Chapitre 1: "T'es comme un gosse qui s'est fait mal et qui essaye de pousser ses petits copains dans le bac à sable pour qu'ils se fassent mal aussi... "

Ma petite enfance, cette période si floue... Je n'en connais que ce qu'on a bien voulu me raconter. Mère décédée, père suicidé, schéma classique de nombreux enfants de l'orphelinat. Mes plus jeunes années là bas, je ne m'en souviens pas. Ce que je me souviens c'est d'avoir été baladée de familles d'accueil en familles d'accueil . J'en ai connu des maisons miteuses, des familles pas toujours tendre, des familles où j'étais ignorée. Pas facile d'être une orpheline. Personne que je pouvais prendre en référence, à croire que j'étais destinée à devenir une gamine paumée. On m'avait inscrit 'No future' sur le front à mon insu. Dommage. Même joueur joue encore … Pourtant, j'étais une petite fille très enjouée, curieuse de tout, souriante, en avance sur beaucoup de chose. Mais je crois que cette vie m'a usée malgré ma jeunesse. Et un jour, alors que j 'avais huit ans et que je n'y croyais plus, une dame de l'orphelinat est venue me voir. « Shanelle … c'est un grand jour pour toi... tu vas rencontrer ton nouveau papa et ta nouvelle maman. ». Je ne dis rien mais n'en pensais pas moins, j'avais envie de lui dire 'Ouais un de plus...'. Et ils sont apparus … Monsieur et Madame Meadows, ils étaient beaux comme une couverture de magazine, ils m'ont donné cette impression que ma vie allait changer, ils m'ont fait espérer que les choses changent enfin. Si j'avais su à quel point je me plantais … Mais je n'en étais pas là. J'étais sur un petit nuage. Ils m'emmenèrent dans leur maison à Los Angeles, la cité des anges, la ville où les rêves pouvaient devenir réalité... Pendant les premières années, ma vie n'était pas loin de la perfection, mais c'était bien trop beau pour être vrai … et pourtant, j'y ai cru tellement fort...




Chapitre 2: "Félicitations tu vas bientôt toucher le fond, c’est bien."

« Papa ? Qu'est ce que tu fais dans ma chambre . ». J'aurais du m'en douter, j'aurais du voir cette lueur lubrique dans son regard, j'aurais du sentir que quelque chose clochait... Il s'approcha de mon lit, avec un air de prédateur. J'avais huit ans et il me terrifiait profondément... J'avais envie de m'enfuir en courant sans me retourner mais mes jambes refusait de bouger, de toute façon c'était bien trop tard, il était assis sur mon lit. D'un geste se voulant tendre, il passa sa main dans mes longs cheveux bruns. Il empestait l'alcool et le tabac froid, un mélange d'odeur qui me souleva le cœur, qui me donna une profonde envie de vomir. Ma petite voix tremblante raisonna dans la chambre, « Papa ? ». Il posa son gros doigt dégueulasse sur mes lèvres, « Chut … tais toi. ». A ce stade là, ce n'était plus de la peur mais de la pure terreur qui s'emparait de moi. Alors je tentai le tout pour le tout, je tentai de m'extirper de mon lit pour m'enfuir. C'était beau de rêver... il m'attrapa le bras et me plaqua sur le lit, il n'en fut pas plus pour me faire pleurer à chaudes larmes. Il me gifla pour me faire taire, « Ferme ta gueule petite garce ! T'as pas intérêt à réveiller ta mère. ». Bref, je vais vous épargner les détails sordides de cette nuit qui a définitivement changé ma vie. Cette nuit où ce monstre m'a volé mon innocence, cette nuit qui m'a brisée, qui a abimé la petite fille que j'étais. Depuis cette nuit, ça a été la descente aux enfer, je n'étais plus qu'un zombie errant, faisant semblant de vivre, effrayée à chaque seconde passée à la maison, terrifiée qu'il me rende une nouvelle visite nocturne. Il me donnait envie de vomir dès qu'il posait son regard sur moi. En sa présence, j'avais des flashs de cette nuit, de ma douleur, de ma honte, de mon envie de lui faire mal, aussi mal qu'il m'avait fait, mon envie de le tuer même. Autant dire qu'il n'en fallut pas plus pour que je devienne ce qu'on appelle une enfant perturbée, une enfant à problèmes. Je me suis mise à trainer avec de mauvaises personnes, des gens plus âgés, qui m'ont entrainés dans les tourments de l'alcool dès treize ans et la drogue à quinze ans. Je sais, l'image d'une gamine de cet age sniffant de la cocaïne avant de se ruer sur une bouteille de Whisky est choquante, mais qu'est ce que je pouvais m'en foutre royalement ! Parce que cette état d'ivresse était la seule façon que j'avais pour ne plus être moi. C'est ça qui m'a fait devenir ce que je suis maintenant. Mon caractère pourri vient de mes blessures. Los angeles … la cité des Anges … la cité de l'Enfer oui.



Chapitre 3: "Les roses sont rouges et les violettes sont bleues, je t’emmerde, sale pute."

« Tiens voilà ce que j'ai eu ce soir. », d'un geste las je jetai une liasse de billet sur la table de la cuisine. Ma mère haussa les sourcils, « Généreux pourboires ... », je la regardai, le regard froid, on savait toutes les deux d'où venait cet argent et ça faisait froid dans le dos. "Quoi tu vas t'en plaindre ?" Je ne dis rien de plus, me contentant de monter dans ma chambre. Je me jetai sur mon lit en soupirant. Je me sentais sale. Du haut de mes 18 ans, presque 19, je ramenai l'argent pour faire vivre la famille … enfin ma mère et moi. Ah oui, vous avez loupez un épisode. Il n'y a plus que ma mère et moi dans la maison. L'année dernière, un soir, on a frappé à la porte, ma mère a ouvert, j'étais juste derrière elle, des policiers. Je me rappelle encore de leur air grave. « Madame Meadows ? », « Oui... c'est moi », l'air du policier se fit plus grave encore. « J'ai une mauvaise nouvelle à vous annoncer... votre mari a été percuté par un camion... il est mort sur le coup, je suis désolé... », ma mère adoptive s'effondra pendant que, moi, je dus tourner la tête pour cacher le sourire qui naissait sur mon visage. Cet enfoiré de salaud était mort, il avait payé... Je savais que ma joie ne pourrait être dissimulée trop longtemps alors j'ai tourné les talons et ai couru dans ma chambre, comme si je m'enfuyais face à la tristesse que me provoquait cette nouvelle. Mais il n'en était rien. Une fois la porte refermée, je me laissais glisser sur le sol pour éclater de rire, un rire malsain, un rire complétement hystérique, à la limite du diabolique. Sa mort me mettait totalement en joie, après ce que ce monstre m'avait fait il l'avait mérité, il l'avait même mérité cent fois. Il méritait la torture éternelle, une longue pourriture en Enfer. J'attrapai mon sac et en sortit ma précieuse cocaïne, je préparai religieusement mon rail avant de rouler un billet que je collai à ma narine, « A ta santé salopard ! », je sniffai bruyamment ma dose, le geste le moins classe du monde qui me menait directement au paradis artificiel, cet endroit où je me sentais libéré de tout, où mon mal de vivre s'en allait, ma bulle à moi, ma bulle dont la chute vers la réalité était toujours trop rude. Quoi qu'il en soit, cette anecdote forte jouissive nous ramène à cette fameuse liasse de billets sortie de nulle part. Disons simplement que depuis la mort de la chose qui me servait de père adoptif, ma mère avait du mal à joindre les deux bouts, elle s'était  tout naturellement tournée vers moi afin que je l'aide dans les finances de la maison. J'avais cherché un boulot sans succès. En même temps, se pointer aux entretiens d'embauche alcoolisée ou totalement cokée n'était pas un gage de réussite... Mais … j'ai réussi à décrocher ce job de barmaid à mi temps dans un bar totalement miteux, mais bon, j'allais pas faire la difficile tout de même. Je ne sais pas ce qui m'est passé par la tête pour me tourner vers ce qui allait devenir ma principale entrée d'argent. Péripatéticienne, prostituée, fille de joie, catin, putain, sale pute … donnez moi le nom que vous voulez, tout ça n'est que de la sémantique. Mon corps est devenu mon outil de travail. Je me fais payer par des gros porcs pour qu'il puisse me sauter dans des hôtels miteux. Et en plus, je dois faire semblant d'aimer ça, regardant le plafond et poussant des 'Ah' lascifs pour leur faire croire qu'ils étaient les meilleurs amants que j'avais connu. Et après ça, je me sentais tellement sale... mais je rentrais à la maison où je racontais à quel point mon métier de serveuse pouvait se montrer rentable avec la générosité des pourboires... Je sais que ma mère n'était pas dupe, je ne suis pas folle. Elle savait parfaitement ce que je faisais et pas une fois elle m'a pris entre quatre yeux pour me supplier d'arrêter ça... quelle mère incroyable hein ? Quelle mère laisserait sa fille vendre son corps de cette façon ? Même si cette fille se révélait loin d'être parfaite. Qu'elle se droguait pour pouvoir supporter tout ça... J'ai la réponse: Aucune.



Chapitre 4: "T’endors pas c’est l’heure de mourir. "

Je sortis de la voiture d'un de mes clients, à peine retournée sur le trottoir, je m'allumai une clope. Voilà c'était fait, une passe de plus. Plus le temps passait et plus j'avais l'impression de m'habituer à tout ça. Oui je sais, là vous devez penser que je suis complétement dingue. Je me fis interpeller par une de mes 'collègues', « Hey Shane, t'es une bonne travailleuse. », je soufflai la fumée de ma cigarette, « Quoi t'es jalouse ? », « Qu'est ce que tu leur fais pour qu'il revienne ? », « J'suis bonne qu'est ce que tu crois ? », bon okay, là, jouer la fière pute me dégoutait. L'autre prostituée leva les yeux au ciel, et moi je me mordillai la lèvre inférieure. Est ce que c'est à ce moment là que j'ai voulu d'autres choses ? Je ne sais pas... Mais ce soir là, je suis rentrée à la maison, j'ai fait mes valises et je suis partie sans demander mon reste. Direction la Colombie, mon pays d'origine. J'avais envie de savoir si je pouvais trouver d'où je venais, si j'avais été réellement quelqu'un un jour et pas juste une vilaine paumée, droguée, violée par son père, tableau classique d'une vie merdique. Le sort en à décidé autrement... Cet avion du destin. Je n'étais déjà pas rassurée de prendre l'avion mais quand les turbulences ont commencé, j'étais vraiment pas fière. Et quand l'avion a plongé là j'ai vu la mort en face... Black out … reprise de conscience dans l'eau. Je crois que c'est un miracle que je m'en sois sortie vivante, j'ai nagé jusqu'à l'île la plus proche … purée quelle chance... Mais ce que j'ai découvert là bas allait de nouveau bouleverser ma vie... Un monde totalement différent où les vampires régnaient. Oui oui vous avez bien lu, les vampires. Ces créatures de la nuit qui ne sont sensés exister que dans nos cauchemars, les livres et les films d'horreur. J'ai été embarquée dans ce monde sans m'en rendre compte. Je suis passée de prostituée à esclave … ce qui revient à peu près au même en fin de compte... Lorcan, c'est lui mon maitre. Il me fascine, m'attire dans les ténèbres, moi la vilaine rebelle, je me soumets, obéis pour le satisfaire, me plie en quatre pour être bien vue, mais il aime aussi quand je lui résiste ... A force de ce traitement, je crois que je suis devenue  sa favorite, je sais j'ai de l'ambition et je l'avoue l'idée de devenir comme lui m'attire tout autant que sa personne. Une nouvelle vie dans la mort en quelque sorte.