La mélancolie du ciel !
Il regardait les corps qui s'étreignaient autour de lui, et soupira d'ennuie. Eleazar n'avait pas pour habitude de rester inactif, mais un noble l'avait gracieusement payé pour s'occuper d'un incube récalcitrant. Il n'était pas non plus du genre à répondre aux ordres d'un simple noble, mais César l'y avait obligé en concédant qu'il avait une mauvaise image auprès de leur alliés et qu'il devait faire bonne figure à présent. Mais Eleazar n'avait jamais été un gentil garçon, et il n'avait pas la prétention de le devenir. Il aimait son image de mauvais vampire, et cela faisait des années qu'il la cultivait. Les femmes en venant à Heartkiller savait vers quel frère allait pour avoir ce qu'elles désiraient. Se taper un sang royal, un prince. Eleazar ne savait pas dire
non à une jolie femme, et il n'avait pas la prétention d'avoir assez de respect pour elle pour leur refuser sa compagnie d'un soir. Il avait une réputation à préserver : celui d'un être qui n'avait aucune limite dans ses agissements, qui ne savait pas faire la différence entre ce qu'il advenait de faire ou non pour un homme de son rang. Il collectionnait les femmes, et les jetait aussi vite qu'il les prenait. Il ne s'inquiétait pas même de leur plaisir souvent, tentant uniquement d'assouvir ses désirs à lui avant tout. Il était sans doute le plus bel enfoiré de toute l'île, mais il le vivait bien. Fut un temps il était le
Gentil Bridgestone , celui que les femmes rêvaient d'épouser. Mais une seule d'entre elles avait faillis voir cet honneur.
Elysium Levinson aurait sans doute été une fille chanceuse, à n'en pas douté. Alors qu'il était son amant, Eleazar était encore un jeune être empli de joie de vivre et de poésie. C'est fou ce que la souffrance, et le deuil pouvait changer les êtres. Eleazar avait perdu son roi et son amour le soir de la révolte contre les Levinson. Il avait suivi sa famille, tentant de sauver leur royaume de la folie d'un vampire devenu incontrôlable. Mais Elysium n'aurait jamais dû mourir ce soir-là. Il n'arrivait pas à se remettre de cette perte injuste, même plus de deux siècles après l'évènement. Il lui arrivait encore de rêver de cette scène cauchemardesque.
Au loin, César levait son épais contre le roi Levinson, prêt à asséner le coup fatal. Eleazar le regardait sans broncher, incapable de bouger, heureux de voir cette guerre prendre fin de manière si impressionnante. Et soudainement, alors que le coup partait, une ombre fine et rapide s'élançait vers le duo, et le corps d'Elysium était transpercé. Elle mourrait sous le coup d'épée de César, et Eleazar allait la recueillir dans ses bras après avoir crié comme un dément. Il allait pour tuer son frère, dans un excès de rage, et c'est Maelyss qui l'arrêtait. Un dernier regard vers César, puis plus rien. Un silence qui dura des heures, et Eleazar qui partait. Il avait disparu loin des siens durant dix ans. Il s'était caché dans le Royaume de Russie, seule Satyne étant au courant du lieux de son exil. Elle était venue le voir de temps en temps, mais Eleazar passait beaucoup de son temps seul ou avec Nymphea Todorov. Il avait préparé sa vengeance.
Aujourd'hui il avait l'impression que César aussi avait préparé la sienne. Il ne comprenait pas pourquoi son frère s'amusait tant à le torturer encore et encore. Il l'avait privé de l'amour de sa vie, et venait de le fiancer à la seule personne qu'Eleazar devait haïr sans doute plus que César lui-même. La seule personne qu'il pourrait aimer pour de très mauvaises raisons. Light Engen était quelqu'un de bien, cela était indéniable. Elle était aussi une vampire incroyablement ennuyante et insipide à ses yeux. SI elle avait le physique d'Elysium, elle était pourtant terne comparé à elle. Eleazar ne voulait pas se marier avec elle, mais il n'avait pas le choix. L'empereur avait parlé. Le destin de Light et Eleazar était à présent scellé. Sans compter qu'en se mariant à l'héritière du trône de Norvège il était évident qu'Eleazar devra quitter son île pour rejoindre les pays du Nord. Ce qui n'était pas pour lui déplaire. Une fois sa vengeance accomplie il avait toujours eu dans l'idée de se retirer. Partir de cette île maudite où il sera incapable d'être heureux. Le souvenir d'Elysium le poursuivait qu'importe où il se trouvait.
Ce soir-là, il quitta la fête où il s'était rendu avec son nouvel élève en colère, mélancolique, et incroyablement triste. Il exigea de l'incube qu'il rentre au Palais, et rejoigne les appartements d'Ellana, l'entraineuse des jeunes incubes et succube, formée par Eleazar lui-même. Sa succube, aussi. Et pour sa part, Eleazar se laissa aller à parcourir le Palais et ses environs sans savoir où il devait aller. Cependant, comme bien souvent quand il se promenait ainsi, ses pas le menaient inexorablement vers un lieu bien précis : les Jardins de Maelyss. Pourquoi ce lieux ?
C'était leur jardin secret à Elysium et lui. C'est aussi qu'ils se cachaient pour se retrouver, qu'ils parlaient d'amour et d'un avenir qu'ils fantasmaient ensemble. A présent, quand il venait dans ces jardins il voyait Elysium courir devant lui, rire, et pleurer. Il la voyait rougissante, et séductrice. Il ne voyait plus qu'un souvenir gravé à jamais dans sa mémoire. Mais elle n'était que cela. Un souvenir. Du vent. Une image dans sa mémoire, une simple image.
LIGHT — Tout se passera bien… Murmura une voix qui le sortie de ses pensés obscures et déprimante.
Il se tourna vers la droite, et derrière un bosquet il reconnut la silhouette de sa chère et tendre. Il se mit à sourire, heureux devant une telle illusion. Mais très vite il déchanta, et reconnue le regard mort de Light. Un regard où il semblait voir son propre reflet.
LIGHT — N'est-ce pas ? Dit-elle alors qu'elle semblait surtout se parler à elle-même. Mais Eleazar l'avait entendu, et en réponse à ses pensés mélancoliques et inquiète il parlait sur le même ton.
ELEAZAR — Rien ne va plus, jamais. Plus rien n'a de sens à présent. Dit-il alors qu'il s'avançait vers elle.
Il pleuvait sur eux, mais il ne s'en rendait pas vraiment compte. Sa chemise lui collait à la peau, de même que son jean noir, mais il s'en moquait. Il se tourna vers celle qui était à présent sa fiancé, et lui prit les mains pour les baiser avec chasteté. Il devait apprendre à être doux et cordiale avec elle. Après tout elle était sa fiancée, ils passeront l'éternité ensemble, autant apprendre à se connaitre, et être respectueux avec elle dés à présent. Il n'avait plus l'habitude d'être courtois avec les femmes, mais très vite sans doute l'ancien Eleazar reviendrait-il à la charge.
ELEAZAR — Bonsoir Princesse. J'espère que je ne vous dérange pas dans votre promenade nocturne. Comment allez-vous ?