Avant de vous raconter mon histoire, je vais vous parler de mon profil psychologique.
L’être humain est complexe, inutile de revenir là-dessus, et inutile aussi de préciser que Shalimar n’échappe pas à cette règle. Shalimar est loin d’être un ange. Tentez donc de l’approcher et vous y laisserez des plumes si vous avez l'intention de l'importuner. La jeune femme est une solitaire, et elle compte bien le rester. Enfermée dans sa bulle, dans ses rêves tout autant que dans des échecs, elle est devenue quasiment impénétrable. C’est son monde et personne n’a le droit d’y approcher. La froideur peint parfois son visage, tant elle craint de voir approcher les autres. Si c'est le cas, son arrogance et son air hautain sont des façades emplies de vérité. Dure à l’extérieur, elle a appris au fil du temps à se préserver des autres, à ne pas laisser ses sentiments prendre le dessus. Il est très difficile de savoir ce que pense la jeune femme, connaître ses véritables sentiments ou bien ses intentions. La belle est quelqu'un qui ne se laisse pas marcher sur les pieds facilement. Sa loyauté à toute épreuve, sa combativité peu importe la situation. Et quoi d’autre ? Elle n’a peur de rien, ou du moins c’est ce qu’elle prétend. Rien ne peut l’atteindre, enfin presque, il faudrait connaître son point faible. De part sa jeunesse et son parcours difficile, Shalimar fait très peu confiance aux gens. Elle ne va pas vers quelqu’un sans un objectif en tête, ou sans éprouver pour cette personne une attirance particulière. Certains prennent cela pour de la réserve, peur de la réaction des gens. Un isolement volontaire, qui cache en fait, la profonde peur d’être déçue, trahie ou blessée. Car pour elle la trahison est impardonnable, elle se montrera par conséquent très rancunière. Shalimar ne cherche pas de noise à quiconque, mais gare à ceux qui se mettront en travers de sa route. C'est une jeune femme à fleur de peau. Le soir lorsqu’elle rentre chez elle, c’est un regard dégoûté qu’elle porte à son miroir, les actes commis, la peur des autres. Cette rage et cette colère qui sommeillent en elle la rongent de l’intérieur. Elle en a conscience. Mais si elle ne sait pas gérer l’intégralité de ses émotions, elle a néanmoins appris à les camoufler à la face du monde. Elle considère de montrer les sentiments comme un signe de faiblesse. Elle n'apprécie pas les faibles, ni les plaintes. Elle avait compris bien assez tôt qu'il fallait être forte pour survivre dans ce monde sombre qui l'entoure. Surtout son monde à elle.
Loyale et fiable, Shalimar tient toujours parole et protège les personnes qui lui sont proches et sans réfléchir à ce que cela pourrait bien lui coûter. Franche, elle l'est sans doute trop puisque cela n'est pas au goût de tout le monde. Sarcastique, insolente et cinglante, elle est loin d'avoir la langue dans sa poche et ne semble pas retenir la leçon après tous les ennuis qu'elle a eu. De nature énergique, elle ne supporte pas de ne rien faire et a besoin d'avoir des occupations. L'inactivité à tendance à la rendre insupportable. Comme le feu, elle est intrépide et curieuse. Elle n'a pas peur de se brûler les doigts pour découvrir ce qu'elle veut savoir. Mais si les flammes sont toujours franches, elle peut se montrer mystérieuse voire même d'une hypocrisie cynique avec les gens qu'elle n'apprécie guère. Shalimar est quelqu’un de déterminée, d’extrêmement têtue. Si elle entreprend quelque chose, elle ne s’arrêtera qu’une fois cette chose accomplie. Pour elle, ça serait une honte de laisser un travail à moitié achevé, et même si elle doit y laisser quelques plumes, elle va toujours jusqu’au bout de ce qu’elle a commencé.
De nombreux cauchemars la réveillent en sueurs et en pleurs dans son lit, alors elle remonte ses genoux tout contre elle, pause sa joue contre ceux-ci et d’un mouvement de balancier, berce ses pleurs en espérant les calmer…
Nuls ne connaient ses blessures ou quelle est la raison de ses larmes parfois lorsqu'elle est allongée seule au fond de son lit, dans la nuit, toujours sur le quivive, en alerte à chaque bruit. Elle apparaît forte, cachant soigneusement ses faiblesses pour vous offrir le meilleur d'elle même ou le mauvais, mais jamais sa propre faiblesse.
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22 Juillet - Moscou.Lorsqu'elle se gara dans le parking en sous-sol de l'immeuble abritant les bureaux de Vladimirovitch ainsi que le musé d'art, Shalimar sentit son estomac se serrer. Thomas, l'employé blagueur du parking, lui décocha un clin d'oeil et agita la main pour la saluer mais elle fut à peine capable de lui sourire en retour. Elle avait été embauchée en tant que stagiaire chez Lazar sur les bases d'un faux C.V. et le prix qu'elle payait pour ce mensonge s'élevait de jour en jour. Par contre, elle n'avait pas menti sur certains points, elle parlait plusieurs langues et elle avait été une étudiante en histoire à Oxford en Angleterre avant d'aller vivre à New York pour entrer dans la police FBI. Elle avait quitté les Etats-Unis cet été pour revenir en Russie, son pays natale. Elle avait fait des recherches poussées avec son équipe du F.B.I sur cette grosse société et s'était fabriqué un C.V. sur mesure afin d'avoir toutes ses chances d'être choisie. Elle avait apaisé ses scrupules en se racontant que la noblesse de sa cause justifiait cette tricherie. Elle pensa soudain à son nouveau patron. Vladimirovitch. Viktor Vladimirovitch. La première fois qu'elle l'avait revu, après tant d'années, le regard perçant de ses yeux gris ne s'était pas attardé sur elle et elle en avait éprouvé un tel soulagement qu'elle avait cru défaillir. Il ne pouvait pas établir un lien avec sa nouvelle secrétaire et la petite nièce qu'il n'avait pas revu depuis plusieurs années. A l'époque, elle avait eu dix ans. Le soudain intérêt qu'il manifestait pour elle lui apparut comme un sombre présage.
-Dépêchez vous, Shalimar ! La réunion débute à 7h30!La voix suraiguë de Maria, la secrétaire, la galvanisa. Le coeur battant, elle s'empressa de gagner la cuisine. Ce ne serait pas bien compliqué, se dit elle en déballant la livraison du traiteur. Il s'agissait simplement de servir le café et les viennoiseries avec grâce et avec le sourire comme elle savait si bien le faire. Cela ne prendrait pas longtemps. Non, dit une petite voix sarcastique dans sa tête. Tu vas juste te retrouver en présence de Viktor Vladimirovitch qui n'est qu'autre que l'assassin de ton père. Rien de bien terrible. Elle se versa une tasse de café dans la cuisine du personnel et l'avala si vite qu'elle se brûla les lèvres et la gorge. Elle aurait pourtant dû être contente que Viktor l'ait remarquée. Elle devait se rapprocher de lui si elle voulait enquêter sur la mort de son père. C'était pour cela qu'elle avait tenu à prendre ce stage. Elle n'avait aucune preuve, évidement. Le rapport officiel était clair : son père était mort au cours d'un accident de bateau. Au moment des faits, Viktor était en voyage d'affaire à l'étranger et Elizabetha, la mère de Shalimar soutenait qu'elle-même et Shalimar, se trouvaient en Italie. Lorsqu'elle avait seize ans, Shalimar avait demandé à sa mère un jour si elle était convaincue que la mort de son premier mari avait été accidentelle. Sa mère l'avait giflée violemment avant de fondre en larmes et l'attirer dans ses bras en implorant son pardon.
-C'était un accident, ma puce, bien sûr que c'était un accident, avait elle répétée d'une voix brisée. Tu ne dois pas penser à ça, c'est du passé maintenant. Je suis tellement désolée...Shalimar n'avait plus jamais abordé ce sujet tabou, mais le silence qui entourait le passé l'oppressait et l'étouffait. Après des années de fuite éperdue sous de multiples noms d'emprunt avec de faux passeports, le tremblement qui s'emparait de la voix de sa mère chaque fois qu'on mentionnait son oncle l'avait empêchée d'aller de l'avant.
Elle en était donc là. En trois semaines, elle n'avait strictement rien appris, excepté le travail qu'elle faisait dans les bureaux. Elle avait deux missions; celle de trouver celui qui avait assassiné son père et savoir si la société Vladimirovitch Corporation trafiquait avec la Mafia. Il y avait plusieurs meurtres non-résolus. L'équipe du FBI savait qu'elle était la nièce de Lazar, c'est pourquoi c'était elle qui s'est infiltrée.
Les pensées de Viktor Lazar.Viktor prit une gorgée de cognac et regarda le ciel de sa terrasse. La lune apparut entre les nuages. Elle fit miroiter la surface de l'eau quelques secondes, puis disparut à nouveau. Il était plus de minuit, mais il trouvait rarement le sommeil à l'approche de la pleine lune. Bien que la morsure du vent fut vive, il exultait tellement qu'il ne s'en souciait guère. Sa nièce n'était pas un petit lapin terrorisé, finalement. Peut être était elle bien sa fille. Elle ne tenait pas son caractère de ce pauvre Anatoli et Elizabetha, dépourvue de tempérament, n'était qu'apparence et frivolité. Cette petite était une véritable Vladimirovitch. Elle était encore à l'aube des miracles et des désastres. Tout pouvait lui arriver. Viktor éclata de rire et reprit une gorgée de cognac. Entrée de Shalimar, dans la salle de réunion de ce matin, il l'avait trouvée très belle, et en même temps vulnérable mais elle l'avait cachée. Elle était belle et forte. Plus connue sous le nom d'Aleksandra Vladimirovitch à l'époque où elle portait encore des tresses brunes. Sa nièce depuis longtemps disparue.
Elle l'avait agréablement surpris. Elizabetha , sa mère, s'était enfuie avec elle, comme la pitoyable froussarde qu'elle était, après la mort d'Anatoli, son petit frère. Elle avait prit tout un luxe de précautions pour couvrir leurs traces, mais elle aurait pu s'épargner cette peine. Elle n'était pas de taille à rivaliser avec le réseau d'informateurs de Viktor. Elizabetha ne l'intéressait plus, mais il avait suivi le parcours de vie de sa nièce. Un très bon parcours. Après tout, elle avait été une étudiante à Oxford, en histoire et littérature, et elle était très douée et maintenant, elle était agent du F.B.I à New York. Il savait qu'elle s'était infiltrée pour enquêter. Le fait qu'elle ait eu l'audace à se faire embaucher par son entreprise en présentant de fausses références l'avait intrigué. Il se demanda vraiment si elle était la fille de son frère. Avec Elizabetha comme mère, et son appétit sexuel, il avait un vrai doute. Avec un rapide calcul mental, il réalisa que c'était tout à fait plausible. Aleksandra pouvait très bien être sa propre fille.
Quoi qu'il en soit, il ne répéterait pas avec elle l'erreur qu'il avait commise avec Anatoli. Pas question de la choyer et de la dorloter. Il va faire d'elle une vraie Lazar. Il serait sans pitié. Le poste qu'il lui avait confié était un premier test. Il avait voulu vérifier son endurance et elle s'en sortait plutôt bien. En plus d'être belle, très charmante, et d'avoir une élocution parfaite, elle était douée pour les langues étrangères, jouissait d'une plume alerte et d'une grande vivacité d'esprit. Elle s'était adaptée à un emploi du temps conçu pour sonder sa robustesse.
Le danger et l'intensité de sa vie étaient à des années lumière de la planitude à laquelle lui-même était confronté, jour après jour. Il jouissait d'un talent exceptionnel pour débusquer et exploiter les faiblesses des gens. Les armes de crimes volées n'étaient que la variation d'un thème de sa collection. Sa collection était aussi vaste et variée. Il aimait collectionner les personnalités des gens, mais depuis quelques années, il jouait avec des personnes dangereuses. C'était cette idée qui l'avait incité à se rapprocher de Kurt Novak. Un hongrois qui se trouvait être l'un des chefs les plus riches et puissants de la mafia russe. Il alluma une cigarette et décrocha le téléphone.
-Salut Viktor. Je suis surpris que tu aies l'audace de m'appeler à cette heure-ci.
-Salut Novak, tu vas bien?
-Viens-en au fait...
-Est ce que tu as entendu parler de la disparition de l'arme du meurtre de Cristiana Macley?
Kurt Novak fut tout ouïe.
-Tu as quelque chose à voir dans cette disparition, Viktor ?
-Je plaide coupable. Tu ne sais pas à quel point le mal qu'il m'a fallu pour l'avoir. Et j'ai aussi en ma possession quelque chose en lien avec cette arme et qui pourrait t'interesser.
-Lequel?
-Une cassette vidéo...une vidéo révélant ton crime.
-Comment as tu fait? siffla Novak
-C'est sans importance. Le plus important, c'est qu'il y a plusieurs photocopies de cette vidéo. Au cas où si je mourrai prématurément, les copies sont en lieu sure. Non que je doute de ton amitié.
-Qu'est ce que tu veux, Viktor?
-Je veux retrouver ma place privilégiées dans tes cercles d'affaires, et tu auras l'arme mais les vidéos, je les garde.
-Tu vas le regretter, Viktor, si jamais tu fais le con, je te détruirai.
-Compris, je prends le risque.
-Au fait, je voulais te demander...J'admire énormément la délicieuse créature que tu héberges en ce moment dans ta garçonnière. Elle est très différente de tes autres maîtresses.
-Que veux tu savoir à son sujet, Novak? Dit-il d'un ton léger.
-Tu n'es pas le seul à te mêler des affaires de tes amis, Viktor. Je suis entrain de regarder les photos pendant que nous parlons. Elle a cet air innocent et d'un côté, elle est ténébreuse. Une innocence lumineuse que j'affectionne particulièrement. Elle est tout simplement exquise. Je serai ravi de m'occuper d'elle si jamais tu es lassé d'elle. Tu sais que l'instruction des jeunes innocentes de son genre est ma spécialité.
-Non, merci, mais je m'en souviendrai Novak.
-Tu sais que je n'hésite pas à payer grassement quand il s'agit de mes loisirs. Je serais très généreux si tu me laissais jouer avec cette belle petite. Quand à l'autre affaire...je te contacterai prochainement.
Il y eut un cliquetis, et la ligne devint muette. Viktor raccrocha, et sentit, choqué, les signes de la peur se propager en lui. Sueurs froides, frissons, aucun ne manquait à l'appel. Il ne se souvenait pas d'avoir jamais eu peur pour quelqu'un d'autre. Réaliser qu'il se souciait sincèrement du sort de sa nièce l'alarma. Qu'il joue avec Novak, c'était une chose. Viktor était un vieil homme déçu et rempli d'amertume que la vie ennuyait et qui n'avait rien à perdre. Mais exposer sa nièce au regard toxique de Novak, c'était différent. Elle ne serait pas de taille à affronter un adversaire aussi diabolique. Il devait la protéger, et l'envoyer loin d'ici avant qu'il ne soit trop tard.
Deux jours plus tard- Vos services ont été requis sur l'île de Monsieur Vladimirovitch. Il s'y retire régulièrement pour travailler. Dans ces cas-là, une équipe prend le bateau privé qui les conduit jusque là-bas.
Une demi-heure plus tard, Shalimar était à l'embarcadère, frissonnant de froid sous le vent de la côte. Elle s'efforçait de se persuader qu'elle était prête à affronter cette île et le tourbillon d'angoisse qui l'envahissait. Sa mère avait menti quand elle avait dit qu'elle étaient en Italie le jour de la mort de son père. Shalimar en était certaine. Elle ferma les yeux et essaya pour la centième fois de se souvenir de ce jour funeste. Elle avait dû le serrer dans ses bras et l'embrasser pour lui dire au revoir lorsqu'il était monté sur le bâteau. Elle souffrait de ne pas se rappeler leurs adieux.
-Bonjour...dit une voix.
Elle sursauta et se retourna. Un bel homme blond et élégant, d'une trentaine d'années, la détaillait d'un regard intéressé, les yeux dissimulés derrière des lunettes de soleil. Il lui adressa un sourire et elle le lui répondit poliment. L'avait-elle déjà rencontré? Son sourire charmeur, conquérant, creusait de profondes fossettes sur ses joues. Elle se serait souvenue de son visage si elle l'avait déjà vu. En silence, il continuait à l'observer et son sourire était vraiment séduisant, mais il émenait de lui une énergie étrange, presque dangereuse.
-Vous travaillez bien pour M. Vladimirovitch ?
-Oui, admit-elle
-Tout s'explique, je vous ai déjà vu. J'ai fait affaires avec votre employeur. J'ai dû surement vous croiser à une soirée.
-Je ne suis chez Vladimirovitch que depuis trois semaines et je n'ai jamais assisté à aucun événement organisé par l'entreprise.
-Je vois...C'est étrangle, j'avais l'impression de vous avoir déjà vu. Puis je vous inviter pour un petit déjeuner?
-Non merci, je dois embarquer.
-Sur l'île de Vladimirovitch, je présume? Je pourrai vous accompagner sur mon bateau, ça serait plus rapide et je dois passer voir Viktor.
-Non, merci.dit-elle.
-Très bien, je n'insiste pas. Seriez vous assez aimable pour transmettre un message à votre employeur?
Les yeux de l'homme glissèrent sur elle après avoir retiré ses lunettes. De la tête aux pieds, puis remontèrent.
-Dites lui que la mise à prix a doublé. Veillez à respecter cette formulation exacte.
Shalimar se fit l'effet d'un animal traqué.
-De la part de qui je dois transmettre?
Il leva la main et effleura son visage. Shalimar recula d'un bond.
-Il le saura...souffla t-il, et on se retrouvera, mademoiselle...
Une lueur sombre passa dans ses yeux et se détourna. Elle le regarda s'éloigner, figée sur place. Cet homme était dangereux, elle le sentait. Rien de bon, elle en avait la certitude. Elle déglutit péniblement.
Trois heures plus tard.Shalimar regardait la masse sombre de l'île se rapprocher. Une impression immense silencieuse émanait de l'endroit. Ce lieu déclancha un flot de souvenirs. Elizabetha, sa mère, s'était toujours plainte de cet endroit pourtant, elle, elle avait adoré cette île. Plusieurs heures plus tard, elle se trouvait dans l'une des pièces de la grande maison en pierre de son oncle.
-Monsieur Vladimirovitch, ce matin, j'ai rencontré un homme qui m'a priée de vous transmettre un message.
Son sourire se durcit.
-Ah oui?
-Un homme d'une trentaine d'années, blond, élégant...
-Je sais de qui il s'agit, m'en dites pas plus.
-Il m'a chargé de vous dire que la mise à prix avait doublé.
La bonne humeur et le charme qui animaient le visage de Viktor avaient disparu.
-Rien d'autre?
Shalimar secoua la tête.
-Qui est cet homme?
-Moins, vous en saurez, mieux vous vous porterez. Vous feriez bien de ne pas encourager cet homme. Evitez le ...
Extrait des paroles de Logan Lincoln, agent du F.B.I.-Fais toi une raison, Logan. Tu as vu et entendu comme moi. Novak la veut. On pourrait boucler cette affaire plus vite que prévu.
-Elle l'a remis à sa place. Si ça se trouve, il ne l'approchera plus.
-Pas Novak. Maintenant, il ne doit avoir qu'une seule idée. Lui donner une leçon.
-C'est bien pour ça qu'elle va quitter la Russie et embarquer dans le premier avion pour n'importe où, le plus loin possible. On s'occupera de son oncle, et on va finir ces deux affaires seuls. Pour le moment, elle quitte le pays. C'est bien trop dangereux. Je ne veux pas qu'il lui arrive quelque chose.
Une semaine après, dans une petite ville du Texas.Des nuages gris foncés, sinistres, traversèrent le ciel étoilé. Le vent se leva, annonçant l'imminence d'un orage. Les feuilles s'envolèrent sur le sentier, les branches des arbres s'agitèrent. Shalimar frissonna et leva un regard anxieux vers le ciel. Le vent soufflait de plus en plus fort. Elle était gelée. Dans sa hâte de quitter l'hôtel, elle avait oublié sa veste. Une prairie parsemée de leurs fleurs sauvages s'étendait à ses pieds. Elle se trouvait à l'orée de la forêt. Elle entendit soudain une respiration haletante, et s'arrêta net, restant immobile sur le qui-vive. Une silhouette masculine apparut soudain à ses côtés. Un visage familier et redouté. Ethan Forbes. Ce criminel , cet acolyte de Novak, l'avait finalement retrouvée. Elle avait affreusement peur mais elle ferait comme si elle était sûre d'elle.
-Bonsoir Ethan...
Forbes comprit en la regardant une nouvelle fois pourquoi Novak la voulait tellement. Elle avait un côté sauvage. C'était une créature dangereuse dans son genre, et imprévisible. Il braqua son révolver sur elle.
-Je ne te veux aucun mal.
Elle eu un visage méprisant.
- Et c'est pour ça que tu braques ton flingue sur moi?
-Il faut que tu viennes avec moi?
-Comment m'as tu retrouvée?
-Je le savais depuis le début, je t'ai suivie jusqu'ici...Si tu te tiens tranquille, il ne t'arrivera rien.
Les yeux de la jeune femme brillaient d'un feu étrange, comme ceux de Viktor quand il est en colère.
-Pourquoi te suivrais-je? Tu me tueras de toute façon.
-Tais toi...Si j'ai voulu te tuer, tu serais déjà morte, crois moi. Novak m'a envoyé te chercher.
-Novak? Elle s'immobilisa soudain. Il lui adressa un sourire mauvais.
-Oui, Novak. Il te veut ma jolie. Je ne crois pas qu'il a l'intention de te tuer, lui non plus. Petite veinarde...
-Il ne m'aura pas, jamais.
-Aller Alek, viens, soit une bonne fille. Pas comme ta mère qui était une vraie salope.
Ses lèvres se retroussèrent sur un rictus et elle se jeta sur lui, dans l'intention de le taper avec le bâton qu'elle trouva au sol. Elle lui donna un coup contre sa mâchoire. Profitant de sa faiblesse, elle fit demi-tour, et s'élança vers la sortie de la forêt. Elle allait quitter celle-ci lorsqu'Ethan la rattrapa et plongea sur elle. Ses bras se refermèrent autour de ses jambes, au niveau de ses genoux, et elle heurta le sol de tout son corps. La chute lui coupa le souffle. Pendant quelques instants, elle resta allongée, cherchant à comprendre ce qui lui arrivait. Ethan la retourna sans ménagement et s'assit à califourchon sur elle, son visage méprisant baissé vers elle. Elle sentit l'odeur écœurante de la cocaïne qui amenait de ses pores. Il la gifla violement.
-Sale garce, tu es comme ta mère. Tu mérites vraiment de mourir. Novak se consolera bien de ta petite personne...
Shalimar vit briller le métal d'une lame qu'il tenait au-dessus d'elle. Il n'y avait que haîne et fureur dans son regard. L'homme abattit son arme. La douleur explosa dans le ventre de la jeune femme, le sang jaillit. Ethan retira le couteau sanglant de sa chair et le leva nouveau. Soudain, un coup de révolver partit en plein dans son cœur. Prise sous la douleur atroce, Shalimar avait trouvé le révolver de son agresseur, et elle avait tirer.
Un hurlement de douleur s'échappa des la bouche de Forbes avant que le silence assourdissant s'abattit dans la forêt. Les yeux fermés, il bascula sur le côté, d'un bloc, comme un tronc d'arbre, l'entrainant avec lui. Elle resta là une minute, tremblante. Ce n'était pas le moment de craquer. Elle venait de tuer un homme, pour sa survie. Elle s'extirpa du poids mort du corps de Forbes. Elle se pencha au-dessus de lui, répugnant à le toucher et remarqua que son propre bras saignait. Abondamment. Elle allait devoir s'en occupait. Tournant les talons, elle laissa le corps inerte. Les cieux se fendirent et la pluie tomba à verse, violente, abondante, comme si un barrage avait cédé quelque part. La plaie sur son ventre était profonde mais superficielle. Elle perdait énormément de sang, elle n'allait pas tenir jusqu'à la ville. La volonté de Shalimar céda. Elle était trop faible pour faire quoi que ce soit. Lentement son esprit, son corps s'envolèrent en fumée, glissant de tout son corps au sol, à quelques mètres du corps inerte de son agresseur. Son corps était aussi mou qu'une poupée de chiffon. Elle ne supportait pas la douleur, elle se sentait partir...Lentement, très lentement, elle était entrain de partir. Son pouls était faible et battait irrégulièrement. Enveloppée dans une sombre atmosphère, elle se sentait glisser doucement tandis qu'elle venait de sentir soudain une présence à côté d'elle... Elle ne voulait pas mourir, mais elle sentait que son heure approchait. Les yeux sombres, et faibles se levèrent quelques secondes sur cette silhouette masculine et inconnue agenouillée à ses côtés avant de les refermer. Elle s'enfonça lourdement dans les abymes sans se douter qu'un vampire était à ses côtés.
Le lendemain....Le rêve était toujours le même mais étrangement cette nuit, le rêve changeait à la fin
Le bateau de son père dévirait lentement, s'éloignant de la rive. Les nuages s'obscurcissaient. Des rafales de vent fouettaient la surface de l'eau et de grosses vagues frangées d'écume venaient s'échouer à ses pieds. La terreur pétrifiait ses entrailles tandis qu'elle regardait le bateau s'éloigner de plus en plus. Un éclair zébrait le ciel, suivi d'un coup de tonnerre.
Elle se retrouvait ensuite avec son père, debout devant un obélisque de marbre noir. Il avait passé un bras autour de ses épaules et son beau visage était d'une pâleur livide. Il montrait l'obélisque du doigts, et elle réalisait qu'il s'agissait d'une pierre tombale. Un sursaut de frayeur la saisissait. C'était sa tombe, la tombe de son père. Elle se penchait pour lire son nom et ses dates de naissance et de mort. Les signes gravés dans le marbre semblaient humides. Plus qu'humides, même. Il semblait qu'un liquide sombre et visqueux s'en écoulait. Sur la surface lisse du marbre, des larmes de sang sillonnaient.
Horrifiée, elle levait les yeux vers son père mais ce n'était plus lui qui se tenait auprès d'elle. C'était son oncle, Viktor. Il la dévisageait de ses yeux froids, d'un gris électrique, avant de disparaître et de donner la place à une autre silhouette sombre, au visage inconnu. Ses yeux froids et ténébreux se fixaient sur elle. Sa bouche révélait des dents blanches anormalement pointues. Cela ressemblait à des crocs...le bras lourd et musculeux qui enveloppait ses épaules se mettait à l'enserrer si étroitement qu'elle avait l'impression que ses poumons allaient exploser. Elle le vit se pencher vers elle, se tendre à sa gorge, tout en le serrant contre lui. Il lui était impossible de s'écarter, figée, presque envoûtée par cet homme étrange.
Elle se réveillait en luttant pour trouver l'air, un hurlement bloqué dans sa gorge douloureuse, les yeux écarquillés d'épouvante dans l'obscurité de sa chambre d'hôtel. A bout de souffle, le coeur battant, sa première pensée lucide était toujours de se demander combien de temps, elle serait capable d'endurer ce rêve affreux avant de devenir folle.
Elle dormait, les cheveux répandus sur l'oreiller en une soyeuse auréole. Lentement, elle s'éveillait de sa nuit agitée et tellement étrange. Ses paupières se soulevaient, en laissant échapper un léger soupire avant de les renfermer. Elle tentait désespérément de séparer fiction et réalité, faits et fantasmes. Elle était meurtrie, endolorie en certaines partie de son corps. Les coups frappés à sa porte tirèrent Shalimar entièrement de son sommeil. Elle se força à ouvrir les yeux. Aussitôt, elle s'alarma. Elle avait l'impression d'avoir été, comment dire...droguée. Elle regarda le petit réveil posé sur la table de nuit. 19 heures. Elle avait dormie toute la nuit et toute la journée. Chamboulée, elle se redressa, avec le sentiment de s'être battue. A la porte, les coups redoublèrent. Le bruit résonna dans sa tête.
- Qu'y a t-il? Demanda-t-elle d'une voix qu'elle voulait résolument calme, bien que son cœur battit à tout rompre.
Elle était en danger. Il fallait qu'elle prenne ses affaires, qu'elle fuie encore, le plus vite possible. Même si cela était vain, elle le savait. Bien qu'elle ait retrouvée la trace de ce tueur en série, il était bien puissant qu'elle même si elle était la nièce de Vladimirovitch et qu'elle était de la police.
-Shalimar, tout va bien? appela une voix d'homme. Jacob Evans. Elle l'avait rencontré, ainsi que sa soeur Shelly, la veille à la salle à manger, avant qu'elle aille dans un club branché. D'ailleurs, elle ne se rappelait plus de cette soirée, ni même d'être retournée dans sa chambre d'hôtel qu'elle avait prise, une semaine avant, à son arrivée dans cette petite ville. Elle était fatiguée, et ne se souvenait que très vaguement de leur conversation. Shalimar avait quitté sa Russie natale pour aller se cacher au Texas, pour fuir un homme qui la traquait, parce qu'elle était la nièce de Viktor Vladimirovitch. Novak ne savait pas justement qu'elle se faisait appeler Shalimar, surtout que son oncle l'appelait toujours Alek mais il était assez rusé pour retrouver sa trâce. Il fallait toujours se méfier et rester sur le quivive.
Elle n'avait pas vu la venue de ce groupe d'un très bon œil, n'avait pas cherché leur compagnie, et pourtant, Jacob et Shelly étaient venus à elle.
-ça va, merci, Jacob. J'ai dû prendre un peu froid, c'est tout, assura t-elle en passant une main tremblante dans ses cheveux. Je suis juste très fatiguée, je suis venue ici pour me reposer.
-Alors, on ne dîne pas ensemble ? dit-il d'un ton plaintif qui l'agaça.
Elle ne voulait aucune contrainte, et la dernière chose dont elle puisse avoir envie était bien un dîner dans une salle à manger bondée et bruyante. Elle ressentait une douleur très douloureuse au crâne.
-Désolée. Une autre fois, peut-être, dit-elle.
Elle n'avait pas le temps d'être polie. Comment avait-elle pu faire une erreur pareille, la veille au soir? Elle qui était toujours sur ses gardes, évitait tout contact avec ses semblables. Shalimar se frictionna les tempes pour tenter d'atténuer ses maux de têtes. Au prix d'un réel effort, elle se dirigea vers la salle de bain. Elle ouvrit à fond les robinets de la douche. Elle était venue ici pour se reposer, se débarrasser de la puanteur du mal, se sentir propre à nouveau et entière. Cet adversaire lui faisait peur mais elle ne s'avouait pas vaincue. Elle savait se discipliner, et garder le contrôle d'elle-même. Et, cette fois, elle parviendrait à suivre son propre chemin. Il n'y avait pas de vies innocentes en jeu, cette fois-ci, mise à part elle. Novak ne voulait pas la tuer, mais l'avoir sous la main, devenir son jouet. Elle n'allait pas le laisser faire, elle était son propre maître. Elle passa un jean délavé et un tee-shirt. Elle fit rapidement ses bagages, jetant vêtements et produits de beauté à la va-vite dans la valise. La lecture des horaires de l'aéroport la consterna. Le prochain train en partance pour New York ne partait pas avant deux heures. Soudain, elle entendit un rire d'homme, grave, moqueur. "Chercherais-tu à me fuir, petite?" Cette voix ...L'humaine se laissa tomber sur le lit, le coeur battant. Le velour de sa voix...Cette voix lui était étrangement familière. Elle divaguait. Non pas possible, se dit-elle en secouant la tête, elle n'était pas elle-même, c'est tout, elle avait besoin de sommeil. Fermement, elle ferma son esprit, et s'intima l'ordre de rester calme et ne pas repenser à cette étrange vision de cette nuit. Elle ne savait plus où elle en était, tout était confus dans sa mémoire. Une chose était sure, elle avait bu une sorte de décoction. On l'avait plaquée contre un corps, on avait forcé sa bouche à s'arrimer à une plaie ouverte. Du sang, un flot de sang avait été versé dans sa gorge. Elle s'était étranglée, avait cru vomir sans parvenir à se détacher de cette blessure. Ce mauvais rêve, ce n'était qu'un rêve, elle ne pouvait pas penser autrement. Elle devait partir. Elle prépara ses affaires et quitta l'Hôtel avant d'aller direction vers l'aéroport. Elle ne se doutait pas un seul instant qu'en prenant cet avion qu'elle allait atterrir sur une île peuplée de vampires...Durant trois semaines, après l'atterrissage catastrophique de l'avion sur l'île, Shalimar avait survécu, et elle avait fait partie du groupe de rebelles avant de se faire capturer par un vampire. Bienvenue en enfer jeune demoiselle....