« Je mène une double vie comme si je marchais sur un fil entre le jour et la nuit »

Ton bassin se claque une derrière fois à ses fesses, tu lui donnes un ultime coup de reins alors que tes ongles s’enfoncent tendrement dans sa chair glacée. Tu lui fais l'amour dans son pieu comme tu n'as jamais fais l'amour à personne. Ton souffle chaud se heurte à son épaule glacée et dans un dernier soupir, elle en arrive à jouir. Alors que ton corps se sépare du sien, tu t'allonges, le regard dans le vide t'en viens à te demander comment peut-elle être aussi froide, comment ses gestes peuvent-ils être aussi rapides, mais tu obtiendras bien assez vite réponse à toutes tes questions. Tu es alors bien loin de te douter que tu vis tes derniers instants de liberté en tant qu'humaine. Nous sommes entre deux guerres meurtrières, la mentalité des gens fait qu'il est difficile de trouver une croqueuse de femmes comme tu l'es toi. Une coureuse de jupons qui aimerait être née dans un autre monde : un monde où le sexe entre deux femmes n'est pas un tabou, un monde où tu pourrais baiser avec la première fille qui croiserait ton chemin. Tu es alors loin de te douter que tu t'es simplement trompé d'époque, mais que tout s'arrangera bien assez vite. Dans une grande demeure qui semble abandonnée, tu as l'impression de squatter les lieux, tu pourrais bien essayer de sortir mais tout t'en empêcherais, tu es faite prisonnière alors que tu es sur le point de fêter ton dix-huitième anniversaire. Mary veut te garder pour elle, pour toujours. Tu sais quels sont ses pouvoirs dorénavant et tu te doutes que si tu acceptes ta condition, l'hypnose y est certainement pour quelque chose. Désorientée durant plusieurs mois, tu ne sais même plus si tu es toujours en Grèce. Elle t'informe que tu as été signalée comme morte au reste du monde. De toute manière, personne ne t'aurais cherché.

« Je mène une double vie celle avec ma petite amie et celle avec les autres filles »

Faible, tu joues du piano comme si plus rien n'avait d'importance, trois années ont passées, jamais un mois sans un déménagement, tu lui demandes où tu es, elle te demande de jouer. Entre les blanches et les noires, tes mains sont abimées, par le temps et les partitions qui défilent sous tes yeux. Tu ne la baise plus, tu ne baises plus. Dorénavant, c'est toi qui te fais baiser. Toi qui auparavant n'aurais pas laissé une demoiselle te dominer, tu te laisse complètement faire. Elle dit te trouver une beauté sans égale mais que tu as perdu la malice des premiers jours. Et sans un mot, tu la laisse te transformer, te retirer le peu d'humanité qu'il te restait pour devenir ce monstre sans retour en arrière possible. Les premiers mois sont difficiles, ta mâchoire te fais horriblement mal et tu peines à trouver un équilibre entre l'envie et le besoin de boire du sang. Les victimes défilent, tu ne sais pas te servir de l'hypnose mais Mary t'explique qu'avec une telle beauté, tu n'en aurais nul besoin. Tu recommences à baiser, à la baiser, c'est ce qu'elle voulait depuis le début. Tu restes sous ses ordres, telle une esclave mais avec bien plus de liberté. Si tu ne veux pas partir c'est parce que tu ressens de l'amour pour elle. Mais pas un amour commun : un amour entre un vampire et son créateur. Pourtant, tu retrouves un côté de ton humanité : ton infidélité. Tu t'échappes la nuit pour en trouver d'autres, tu la trompe avec toutes les autres filles mais de toute manière elle fait pareil de son côté et il vous arrive parfois de le faire ensemble. Tes crocs s'enfoncent dans une nouvelle victime, là où auparavant tu aurais enfoncé tes ongles. Le sang coule à flot et vous ne semblez pas craindre les conséquences.

« Je mène une double vie et je sais déjà comment ça va finir : mal. »

Décidée, tu te rallies à la cause des Bridgestone. Allan Levinson tombe de son trône. Tu déménages alors une dernière fois pour Heartkiller avec Mary. Elle décide de faire de toi sa succube personnelle. Tu voyages sans cesse, ramenant à celle que tu chérie les meilleurs humains qui croisent ton chemin. Tu les convaincs d'un seul regard, d'une seule parole. Ils te suivraient jusqu'au bout du monde. Elle garde celle qu'elle préfère, tu fais ce qu'il te chante des autres. Tu en libères dans la nature certains, à leur perte, tu en prend quelques uns sous ton aile, tu baises la plupart mais tu n'en tues jamais. Mary ne t'excites plus, tu couches avec d'autres, sans rancune. Tu as même quelques régulières, certaines amantes sortent du lot, tu en viens à encore plus les aimer que ta maîtresse de toujours. Et cette dernière fait un mauvais choix d'amant : un adepte de sadisme extrême, il la vide de tout son sang avant de lui planter un pieu en plein cœur. Tu étais bien loin d'elle lorsque ça s'est passée, mais tu as senti la moitié de toi-même s'envoler. Pour noyer ton chagrin, les demoiselles défilent pendant plusieurs semaines, tu les prend une à une dans ce lit qui était autrefois le votre. Tu tentes d'effacer le moindre souvenir d'elle. Mais comment oublier toute une vie ?