Cela ne doit pas faire un mois que Lorena est partie de façon précipitée et déjà, un manque commence à se faire ressentir. Elle est certainement la personne avec qui j'ai été le plus complice dans ma vie et son départ me laisse un peu perdu, je dois bien le reconnaître. C'est un pensant à cela que, laissant le corps de mon esclave s'écrouler au sol, affaiblie par son cou déchiqueté par mes soins, je sors de la pièce qui me sert de chambre depuis quelques temps à présent. M’aventurant dans le couloir, je jette alors un coup d’œil sur le côté, laissant mon regard vagabonder sur le jardin. C’est alors que mes prunelles tombent sur un homme, s’évertuant à farfouiller parmi les buissons. Je fronce les sourcils, trouvant ses pratiques tout de même un peu bizarres. Accélérant un peu le pas, je me laisse gagner par la curiosité, alors que je m’empresse de rejoindre l’endroit où il se trouve. Cela ne sert à rien de me dépêcher pourtant, puisqu’il n’est qu’un vulgaire humain ; cela se perçoit à ses manières peu élégantes, mais aussi à son odeur qui flotte dans tous les environs. Il ne possède pas le genre de sang auquel je goûterais ceci dit. Me plantant derrière lui, je croise mes bras sur mon torse, le fixant d’un air mauvais. Mais à vrai dire, je n’ai même pas besoin d’élever la voix pour qu’il se décide à se relever. Alors qu’il finit de se redresser, je me décale légèrement pour voir ce qu’il pouvait fabriquer dans les buissons. Seule la pelouse abimée me saute aux yeux. Je ne parviens pas à retenir un éclat de rire, alors que je continue de le toiser d’un œil sévère. « Tu es tellement habitué à être traiter comme un chien que tu finis par te conduire comme tel en te creusant des trous ? Il ne te reste donc aucun semblant de dignité ? » Je secoue la tête, lui montrant ainsi clairement à quel point je le trouve pathétique. Déliant mes bras, je les laisse tomber des deux côtés de mon buste alors que j’effectue un pas en avant, adoptant une attitude plus menaçante encore. « Que penses-tu que ton maitre dirait s’il apprenait que tu tentes de t’échapper à la vue de tous ? Crois-tu vraiment qu’il apprécierait qu’un simple esclave le fasse passer pour un idiot sans autorité ? » je lui demande d’une voix grave, faisant peser chacun de mes mots pour leur donner plus d’ampleur alors que je me penche légèrement au dessus de lui.

Les bras toujours croisés sur mon torse, je toise l’esclave d’un air mauvais. Arrogant, celui-ci se redresse un peu plus, me rendant mon regard. Je ne dévie pas pour autant mes prunelles, tentant de me donner un air encore plus méchant que généralement. Je n’aime pas particulièrement les jeunes rebelles en tant qu’esclave et il est tout à fait inutile d’évoquer ce que doit en penser la famille Bridgestone. Ils se feront certainement plus intransigeants à l’égard de l’homme face à moi, s’ils apprenaient la nouvelle de sa tentative de fugue. Car celui-ci tente bien de fuguer, il ne cherche même pas à le nier, tout comme il n’envisage même pas d’essayer d’arranger son cas. Au contraire, il s’enfonce dans sa bêtise, me prenant pour un idiot alors qu’il me lance quelques paroles arrogantes au visage. S’il était mon esclave, je lui aurai déjà certainement arraché la tête, mais il ne l’est pas et les Bridgestone verraient certainement d’un mauvais œil que je m’approprie la sentence destinée à un être leur appartenant. Aussi dois-je prendre la situation avec un certain détachement qui ne révèle généralement pas de ma compétence. Mes esclaves ont eu le don de le comprendre assez rapidement. Celui-ci se montre beaucoup moins futé et donc moins apte à recevoir ma clémence. Je passe rapidement ma langue sur les lèvres avant de les pincées, essayant de prendre sur moi pour ne pas lui inculquer la leçon qu’il mérite, alors qu’il me contourne, prétextant aller ramasser des fruits. Comme s’il peut simplement me servir la première excuse lui venant à l’esprit, afin de se débarrasser de moi. Je n’ai pas réellement l’impression qu’il sache à qui il s’adresse. « Crois-tu vraiment t'en tirer ainsi ? » je lui demande, sans faire le moindre effort pour dissimuler mon agacement. Tout comme il n’en fait aucun pour me préserver du dit agacement à vrai dire. Ainsi croit-il qu’il peut se jouer de moi, sous prétexte que je ne suis pas son maître. Bien sûr, cela engendrerait certainement des querelles si je lui donnais la mort ; mais qu’est-ce un simple esclave – tentant de fuguer de surcroît – face à un conseiller ? Rien, et s’il réfléchissait un peu, il le devinerait certainement au même titre que moi. M’avançant de nouveau dans sa direction, je viens me placer à côté de lui, faisant mine d’examiner les arbres fruitiers devant lesquels il s’est lui-même planté, quelques instants auparavant. « Et si nous rendions tous deux visites à ton maitre ? Je suis absolument certain qu’il sera ravi d’apprendre ce que tu étais en train de faire. Il me semble que les Bridgestone aiment garder un œil sur les choses qui leur appartiennent. » Un sourire narquois apparaît sur mes lèvres, alors que je lui lance un coup d’œil. Je suis à peu près certain que le fait que je l’ai qualifié de la même façon que je l’aurais fais pour un objet, ne lui convient pas. Mais qu’importe, un simple humain ne peut rien contre ma nature de créature de la nuit.

L’apparition de César Bridgestone, se fait aussi soudaine qu’inattendue. Et quand bien même je ne sursaute pas lorsqu’il touche enfin terre après être descendu de l’arbre dans lequel il logeait, je dois tout de même m’avouer assez surpris de le voir là. Toute mon attention étant alors dirigée vers l’esclave, je suis contraint d’avouer que je n’ai pas remarqué sa présence, alors que mon odorat aurait dû me permettre de reconnaitre son odeur au milieu des branches d’arbre couvertes de fruits. Mais peu importe au final, si je ne feins pas la surprise, jugeant la chose assez inutile. Il doit lui-même savoir que je me serais montré beaucoup plus brutal envers son esclave, si jamais j’avais su sa présence. Aussi n’est-il pas utile de lui témoigner le fait que je ne savais pas qu’il se trouvait là, il l’a sans doute déjà deviné par lui-même. Je lui adresse un signe de tête poli alors qu’il avance à notre rencontre, me reléguant automatiquement au simple rôle de conseiller alors que je le laisse reprendre sa place de maître tandis qu’il se place face à l’esclave. Son esclave. Homme déjà partiellement mort il me semble, chose qui m’attriste tout de même quelque peu. Il m’était tout de même assez divertissant, alors le voir succomber aussi rapidement, pourrait se résumer à une grande perte, s’il n’était pas qu’un vulgaire esclave. Aussi je les observe sans mot dire, n’étant plus que simple spectateur de la situation. Du moins, jusqu’à ce que le Bridgestone ne demande à son esclave, de s’excuser auprès de ma personne. Je hausse un sourcil, le dévisageant un moment avant de laisser un sourire satisfait apparaître sur mes lèvres. Je ne m’attendais pas à ce qu’il exige une telle chose, mais je dois avouer que cela fait plutôt du bien de me savoir assez important, pour posséder le mérite que l’on exige d’un esclave de l’un des suzerains de l’île, qu’il s’excuse auprès de ma personne. Aussi je me tourne vers celui-ci, mais remarque aussitôt qu’il ne m’adresse aucun regard, ses yeux rivés sur son maître, avant qu’il ne se mette à le défier. Je déglutis, en étant presque bouche-bée, tellement la situation me paraît être choquante. Comment ose-t-il commettre un acte pareil ? Je sais que je ne peux décemment pas m’en prendre à lui devant César, mais cela ne m’empêche pas de me faire m’insurger intérieurement, à tel point que je finis par en lâcher quelques paroles : « Insolent. Excuse-toi auprès de ton maître ! » je lui crache au visage. Je ne cherche pourtant pas à aller plus loin, sachant pertinemment que cela serait faire un affront à mon tour au Bridgestone, puisque cet esclave lui appartient. Un esclave qui ne mériterait même pas que son maître lève la main sur lui, puisque celui-ci risquerait de se souiller, si son sang venait à gicler. Si bien que je me tourne vers César, la mâchoire toujours serrée, énervé par le comportement du blond dont l’odeur du sang coulant le long de la main, vient me titiller les narines. « Me feriez-vous l’honneur de me laisser lui apporter la correction qu’il mérite ? Avec tout votre respect. » je lui demande respectueusement, en m’inclinant légèrement face à lui. Marque de soumission qu’il ne m’arrive pas bien souvent de faire. La chose est même plutôt rare quand on y pense, mais qu’importe, les Bridgestone se trouvent être assez nobles pour obtenir une telle distinction de ma personne.

Petite précision relative à mon post, :hii:

César semble se trouver agacer par ma proposition, pourtant elle se trouve être tout à fait honorable. Je n’ai pas réellement envie de faire l’éducation d’autres esclaves que les miens, cela me prend déjà suffisamment de temps ainsi. Seulement, c’est le sous-entendu que cela révèle, qui se trouve en mesure d’agacer le Bridgestone. Je le vois bien derrière son air pincé, son regard froid et ses lèvres figées. Il me déteste pour ce que je viens de dire, ne semble pas accepter le fait que je relève qu’il ne sait pas réellement éduquer ses esclaves. Pourtant, cela ne se trouve pas être une véritable critique, juste que cela relève sans aucun doute, le fait qu’il n’a pas que cela à faire et que d’autres choses accaparent son esprit. Du moins est-ce ainsi que je vois les choses, pas autrement. Et ce, même si César semble s’évertuer à voir cela comme un affront. Pourtant, il prend sur lui, sinon il m’aurait déjà sauté à la gorge depuis un moment à présent. Nous nous observons pendant un moment, nos iris plongées l’une dans l’autre, sans qu’aucun de nous ne prononce un mot. Il faut dire que ce n’est pas à moi de briser le silence et je le sais bien. Aussi finit-il par le faire au bout d’un moment, semblant prendre en considération que c’est son rôle de le faire, alors que je m’empresse de détourner le regard, comme-ci il s’agit là d’un signal, afin de m’indiquer que je suis autorisé à le faire. Laissant mon regard vagabonder dans le vide, je ne le baisse pas pour autant, alors que du coin de l’œil, je me trouve en mesure de voir César s’approcher de son esclave, pour lui soutirer le sang de sa blessure, de façon sans doute plus sensuelle que nécessaire. Je fronce légèrement le nez, n’appréciant pas réellement que ce petit manège se déroule devant moi. Après tout, quel besoin à le Bridgestone de faire cela en extérieur, juste sous mes yeux ? Moi aussi j’ai soif à présent. Pourtant, il n’est pas question d’aller m’abreuver au cou de Sullivan, quand bien même celui-ci semble avoir du sang à offrir. Déjà parce que cela serait une marque d’un total manque de respect à l’attention de César, mais aussi parce qu’il n’est pas mon esclave et que, par conséquent, je me réserve le droit de le juger inapte à satisfaire à mes besoins. Alors que celui-ci s’excuse sous la pression de son maitre, je ne peux m’empêcher de lever les yeux au ciel. « Monsieur Bridgestone, me voilà contraint de me sentir honoré face à la considération que votre esclave m’apporte soudainement, j’en ai bien peur. » Sous l’effet de la puissance de César lui-même ? J’ai bien peur que non. Sullivan ne semble pas être réellement apeuré par la situation présente, à peine un peu essoufflé, sans doute en raison de son maître qui vient de lui pomper le sang, rien de plus. « Vous me faites là un bien grand honneur, monsieur Bridgestone. Puis-je faire quelque chose pour vous en remercier ? » je lui demande, non sans laisser filtrer une pointe d’ironie malsaine dans ma voix. Presque du sarcasme.