Jamais je n'aurais cru cela un jour possible. Jamais dans toute ma vie j'aurais pu croire à une telle chose. Nous étions en 1925, alors que la guerre politique confrontait Adolf Hitler au NSDAP et qu'un homme connu proposait une alliance entre le Royaume-Unis, l'Allemagne, la France et l'Italie, ma famille et moi vivions d'heureux jours tranquilles dans une ferme. Je suis née dans une campagne en Bavière. Le 2 décembre 1925. J'étais fille unique et dès mes premiers pas, mes parents furent comblés d'avoir une nouvelle main pour pouvoir travailler. Dès mes quatre ans, je savais déjà ce que je devais faire et ne pas faire. Je savais nourrir les chevaux et les vaches. Et j'apprenais à récolter les oeufs dans les nids de poules sans me faire agresser par le coq. Malgré le dur travail que mes parents m'infligeaient, je n'avais pas à me plaindre. Ils m'aimaient, je les aimais. Plus le temps passait, plus je grandissais. La relation que j'avais avec ma mère était complice, tandis que mon père essayait de faire fuir les quelques prétendants qui sonnaient à la porte. Ce jour où je suis née une deuxième fois, c'était en 1944. Paris était prise par les forces allemandes durant la seconde guerre mondiale, nous étions tranquille dans notre campagne, quelquefois, même souvent, des bombes retentissaient et des avions passaient au-dessus de la ferme. Mais jamais nous avions subi les foudres de la guerre. Nous étions isolés du monde. Seuls...

Le 5 juin, alors que je me baladais dans les champs de tournesols ; je rencontrai un jeune militaire perdu. Blessé, affamé et brulé au troisième degré. Sa peau fumait et il se protégeait du soleil étouffant d'été avec un imperméable. Ce fut dur de le ramener à la ferme, je me souviens encore de ces quatre km que j'avais dû parcourir en le traînant. J'avais été élevée dans le respect des autres et dans l'empathie, il était de mon devoir de jeune fille d'aider un souffrant. Quand il fut arrivé, à l'ombre, dans les écuries, je me redressais pour aller chercher mon père. Il fallait appeler un médecin. Mais une main incroyablement gelée attrapa mon poignet.

- J... Je sais ce que tu veux faire...
- Monsieur, vous êtes mourant, je dois appeler un médecin !

Mais quelque chose dans ses yeux me convînt de n'appeler personne. Je me souviens nettement de ce visage dur mais mystérieux. Bien sûre, si j'avais su qui il était réellement, jamais je ne serais venue à son secours. Il resta deux mois chez nous, mon père l'avait accepté par pure âme charitable et puis il pouvait travailler le temps de se remettre de ses blessures. Il disait souvent ne jamais travailler le jour, qu'il avait une sorte d'allergie au soleil. Et il ne mangeait pas notre nourriture sous prétexte qu'il ne voulait pas nuire à l'économie durement gagnée de notre famille. Je l'entendais toujours sortir la nuit pour continuer les travaux qu'il avait commencés la veille. Il parlait très peu de lui, juste qu'il avait déserté par les horreurs qu'il avait vues pendant la guerre. Nous devenions de plus en plus proches. C'était un homme d'environ quarante ans, mais il en passait pour moins que ça. Le soir, je le rejoignais devant l'écurie alors qu'il construisait des fers à cheval à la forge. Je le regardais et parlait avec lui du monde extérieur. Puis un jour, il retira ses gants de cuir puis s'approcha de moi. Il posa sa main contre ma joue puis approcha son visage, j'eus un petit soupire de peur.

- Il est trop tard pour renoncer... Car tes yeux ont déjà cédé...

Puis il m'embrassa. Peu à peu je découvrais des choses à son sujet... Difficile à croire mais, cet homme étant autre chose qu'un être humain. Quelques fois, il me disait que son coeur ne battait plus et qu'il devait tuer pour se nourrir. Je me souviens lui avoir demandé de me montrer.

- Tu en souffrirais...

Il ne répondait à mes questions que par des brefs oui et non. Jusqu'au jour où je l'espionnai dans la forêt. Je le suivais sans bruits. Cette soirée là, il avait été énervé par quelque chose. Il s'attaqua tout d'abord à un campeur, pour étouffer mes cris, je plaquais mes mains contre mes lèvres. J'avais peur et ma curiosité m'avait coûté la vie. Bien sûre qu'il savait que j'étais là. Il voulait que je voie, que je vois ce qu'il était. Quand il relâcha l'homme inerte, il resta un instant debout.

- Tu fais autant de bruit qu'un troupeau d'éléphant sur des klaxons...
- Qui es-tu ? Qu... Qu'est-ce que tu lui as fait ?

Il se retourna vers moi puis essuya ses lèvres du sang qu'il avait ingéré. Puis il m'expliqua tout. Il est né en 1780 en Angleterre et il a choisi de devenir un "mort-vivant" car l'espèce humaine était un cauchemar. Il m'expliquait aussi que le jour où je l'ai trouvé, c'est le soleil qui l'avait brûlé et non une source de feu... Mais au fond de moi, je le savais.

- Zephyra, tu ne sais rien du monde qui nous entoure... Tu ne sais pas l'horreur que produisent les êtres humains... Je peux t'offrir le cadeau de l'Immortalité si tu le souhaites. C'est tout ce que je peux t'offrir en retour d'avoir sauvé ma misérable vie. Nous traverserons les âges ensembles...

Je l'avais chassé. J'avais eu mal, car, au fond mon coeur lui appartenait. Quand la guerre se termina, j'avais quitté la ferme familiale pour découvrir le monde. Le militaire que j'avais rencontré il y avait deux ans et que j'avais chassé était partit. Je n'eus pas de ses nouvelles. Quand j'arrivai en ville en Allemagne, des gens pleuraient, des cadavres étaient allongés par terre. Tous les Allemands ont été forcés de regarder le génocide. L'armée américaine et française se trouvait à Berlin, à la gare ; Alors que je venais juste d'arriver, j'avais été prise par la foule en pleurs. Quelques militaires nous insultaient de "pourris", de "meurtriers". Ces corps allongés revenaient d'un camp d'extermination. Tous juifs, tziganes, homosexuels... Tous tués dans d'infâmes souffrances par les nazis. C'est ce jour ci que j'ai vu ce dont les humains étaient capables. Comment avions-nous put rester dans notre campagne alors que des humains s'entre-tuaient !? Je comprenais ce que le vampire m'avait dit. Cette année-ci, je tentais de vivre ma vie.

J'avais été tombée amoureuse d'hommes qui m'avaient lâchement chassé ensuite. Mes parents avaient été tués dans un incendie. Je n'avais plus rien à perdre. Le vampire me manquait... J'étais seule... Je me concentrai alors mes forces sur la haine de l'espèce humaine et à chercher celui qui m'avait proposé l'immortalité. Puis quand je tombai sur lui, il était toujours aussi beau et charismatique. J'étais entrée dans un bar tout simple en plein jour ne trouvant plus la joie de vivre. Il portait une capuche fixée sur un long manteau de cuir. Sa peau avait viré au grisâtre et le contour de ses yeux s'était assombrit. Peut être était-ce à cause du soleil ?

- Que fais-tu ici Zephyra ?
- Il fait jour ! Vous, que faites-vous là ?
- Je vois sur ton visage que tu t'es rendu compte de ce que vaut les êtres humains. Tu as vu les déportés ? Tu as vu ce que ton espèce a fait ?
- Je ne savais pas, je ne savais rien de ce qu'il faisait !
- Peut être parce que tu étais trop préoccupée par les jupons de ta mère. Tu fais partie de l'espèce humaine, alors tu es comme eux.
- Alors, faites-moi votre promesse... Donnez-moi l'immortalité...

C'est ce qu'il fit, mais il préféra attendre le soir. J'avais à la fois peur et excitée... Nous étions dans son manoir, il l'avait acheté récemment. Après avoir allumé quelques bougies autour d'une couverture posée sur le sol, je m'y allongea nue. Quand il arrivait, ses canines étaient sorties, il s'assied près de moi, dans le cercle des bougies.

- Es-tu réellement sûre ?
- Je le veux...

On aurait dit un mariage satanique... Il m'embrassa puis j'avoue m'être laissée emportée par une pulsion sexuelle. Je me souviens de cet instant... Nous faisions l'amour, tendrement, puis bestialement... Mais c'était doux, fort, intense, bon. Puis à la fin, quand mon coeur battait fort, il planta ses crocs dans mon coup et se délecta de mon sang. Puis ce fut le trou noir. Je ne me souviens que d'une chose le lendemain après midi. C'était un après-midi ensoleillé... Chaud... Je me rappelle une vision... Moi en train de partir me protégeant du soleil nuageux avec un vêtement et lui à la porte... Il restait figé, sa peau fumait et il me regardait avec tristesse. En tout cas, cet après-midi chaud, il offrit sa vie pour me retenir...