Alors tu veux vraiment que je te raconte l'histoire de ma vie misérable !? Je n'y vois pas l'intérêt. Tu sais, je ne suis pas un vampire. Je n'ai rien de bien intéressant à te dire. Pas d'amour déchirant ou de manière dont j'aurais été transformée. Juste l'histoire d'une humaine bien banale. Mais si c'est ce que tu veux vraiment, je te dirai tout. Sans censure, sans adoucissement des faits. Juste mon histoire crue & véridique. Sois bien attentif parce que je ne te dirai pas tout ça deux fois. Prêt ?? Alors je me lance.

Je suis née à Londres le 24 mars 1995 dans une famille tout ce qu'il y a de plus banale. En fait, si les chose se seraient déroulées différemment, j'imagine que j'aurais pu avoir une vie heureuse. Enfin je l'espère. J'étais la seule & unique fille du couple Davidsson, deux simples ouvriers comme on en voit partout. Ma mère était pâtissière dans une boutique réputée à travers toute la ville, & mon père travaillait dans une usine de papier, pratiquement à l'entrée de la ville. Bref, je n'étais pas destinée à vivre dans la richesse, mais au moins, j'avais des parents qui s'occupaient bien de moi. Du moins ce fût le cas pendant les quatre premières années de ma vie. Après, tout devint plus compliqué. Ma mère tomba gravement malade. Un cancer d'après les médecins. Pour moi, à cette époque, ça ne pouvait être rien d'autre qu'une petite grippe de passage. Il me paraissait complètement impossible que ma mère vienne à me quitter un jour ou l'autre. Et pourtant, à peine quelques mois plus tard, elle disparue définitivement de mon existence. La maladie était trop forte, & bien qu'elle se soit battue de toutes ses forces au cours des dernières semaines de sa vie, elle ne parvint pas à vaincre la maladie. Elle me laissa donc seule auprès de mon père autrefois si aimant. Je dis bien autrefois parce que après le décès de sa femme, il sombra dans une dépression des plus profonde. Il ne tarda pas à perdre son emploi à l'usine &, peu à peu, il sombra dans l'enfer de l'alcoolisme. J'aurais volontiers voulue l'aider, mais hélas, la toute petite fille que j'étais à l'époque n'y pouvait rien. Tout ce que je pouvais faire, c'était lui apporter le maximum d'affection afin de lui rappeler qu'il n'était pas seul au monde.

C'est peu après mon septième anniversaire les choses compliquèrent encore plus. Mon père était perdu, complètement absorbé par les bouteilles de bière qu'il s'envoyait jour après jour. Il ne tarda pas à ressentir une forme de répulsion envers moi, comme si son malheur dépendait de moi & de moi seul. Il se montra dure envers moi, allant même assez régulièrement jusqu'à me frapper. Moi, je ne disais rien. Que pouvais-je dire de toute façon ?? Peut-être qu'il avait raison. Peut-être que ma mère était morte à cause de moi & que je méritait le sort que mon paternel m'infligeait jour après jour. Si tel était le cas, je devais encaissée sans rien dire. Qui sait, peut-être finirait-il par retrouver la raison. En attendant, je tâchais de me faire la plus discrète possible. J'apprenais convenablement mes leçons & le soir venu, je m'enfermais dans ma chambre afin d'observer mes quelques livres que j'avais. Petit à petit, j'appris à lire & dès lors, les choses devinrent beaucoup plus simples pour moi. Je pouvais m'évader dans des mondes où rien ni personne ne pouvait me faire le moindre mal. J'étais en sécurité & bien loin de cette triste existence qui était la mienne. Certes, ce bien être ne durait pas forcément très longtemps, mais au moins suffisamment pour que je n'aie pas envie de mourir à la moindre occasion.

L'enfance finit par faire place à l'adolescence, & c'est précisément à cet instant que les choses se compliquèrent radicalement. Alors que la plupart des autres élèves étaient plein de vie, rigolant les uns avec les autres & prenant plaisir à vivre, j'étais plutôt solitaire & repliée sur moi-même. À vrai dire, je n'avais pas vraiment de camarades de classe avec lesquels je m'entendais particulièrement. Mes seuls véritables amis étaient les livres que je retrouvais à la bibliothèque pendant mes moments de liberté. Il va sans dire que mon comportement différent m'a rapidement attiré les moqueries de mes camarades. Ils ne semblaient pas comprendre à quel point ma vie était difficile. Mon père était toujours aussi froid & agressif envers moi. S'il fallait qu'en plus je supporte la méchanceté de mes collègues de classe, j'étais mûre pour un allé simple vers l'asile. En même temps, je ne pouvais pas vraiment leur en vouloir. Ils ne comprenaient pas la situation dans laquelle je vivais. Je n'avais jamais parlé à qui que ce soit des coups que m'infligeait mon père, préférant camoufler les bleus sous des chandails à manches longues & des pantalon beaucoup trop grand pour moi. Si je n'en parlais pas, je pouvais faire comme si tout ceci n'était pas réel. Seulement voilà, à l'âge de quinze ans, je finis par en avoir plus que marre de tout ça. Je ne pouvais plus continuer à me faire frapper ainsi. Je pouvais plus subir les moqueries de tout ceux qui m'entouraient. Alors je suis partie. J'ai pris les quelques effets personnels qu’il me restait & je me suis enfuis de chez moi. Je m’en fichais de vivre dans les rues. Je m’en fichais de ne plus avoir personne au monde. Tout ce que je voulais, c’était de vivre libre & me débrouiller par moi-même.

J'ai vécue pendant quelques jours à travers les rues de Londres, essayant par tout les moyens de survivre de mon mieux. Vous savez les histoires de jeunes orphelins qui grandissent dans les rues & qui passent la plupart de leur temps à fuir la police qui voudrait les conduire à l’orphelinat ?? Et bien c’est précisément ainsi que je me sentais. J’avais peur à chaque instant que mon père lance un avis de recherche à mon sujet & que la police me retrouve. Je ne voulais pas rentrer chez moi. Je savais que s’il me retrouvait, il allait me donner la dérouillée de ma vie, & je n’en pouvais plus de ses coups. Je parvins donc à me cacher pendant presque une semaine, essayant le plus possible de retrouver foi en la vie. J’allais y arriver. Il le fallait.

C’est le cinquième soir de ma fuite que je fis sa connaissance. Je me souviens encore précisément de cet instant parce que c'est la seule & unique fois de mon existence où j'ai été persuadée d'être morte. J'avais croisée bien des hommes dans ma vie, mais aucun n'avait été doté d'une telle beauté. Et le plus étonnant dans tout ça, c'est qu'il semblait réellement vouloir m'aider. Le sourire aimable, il me dit s’appeler Vasiliy & il me proposa de l’accompagner. Je sais, j’ai été idiote & naïve, mais au point où j’en étais, j’étais prête à faire confiance à n’importe qui. En à peine une heure, on se retrouvait à l’aéroport & on prenait un avion en direction d’une destination qui m’étais complètement inconnue. Je me surprenais moi-même de mon audace. Sans même réfléchir, j’avais suivit cet étranger exactement là où il voulait me mener. Ça faisait peur mais en même temps, je me disais que ça ne pouvais pas être pire que là d’où je venais. Si seulement j’avais su que je n’étais pas au bout de mes surprises…

Au bout de plusieurs heures de vol, nous finîmes par arriver dans un pays qui m’était complètement étranger. Dans un pays qui comme le mien était assez lugubre, mais qui en même temps dégageait beaucoup plus de froideur :: la Russie. Une nouvelle fois, je fus prise d’une certaine panique, mais mon charmant guide me rassura encore une fois d’un simple regard. Tout irait bien. Il le fallait. Nous nous retrouvâmes assez rapidement devant un imense château de pierres lugubres, du genre qu’on voit dans les films d’horreur. Je ne comprenais pas pourquoi Vasiliy vivait dans un tel endroit, mais je ne dis mot là-dessus, me contentant de le suivre à l’intérieure. Je ne savais pas que ce château était peuplé d’être mi-vivants mi-morts comme on en voit uniquement dans les livres habituellement. Des vampires. Ce n'est que lorsque j'ai finis par rejoindre d’autres humains comme moi que je compris que quelque chose clochait. Certains d'entre eux semblaient en état de transe, alors que d'autre jonchaient le sol, raide morts & vidés de leur sang. À cet instant, je sentis la panique me gagner. Sans pouvoir m'en empêcher, je me mis à insulter mon geôlier, le traitant de monstre & de je ne sais plus quoi à présent tellement j'étais dans une colère noire. Vasiliy se serait sûrement chargé de mon cas si un autre vampire ne s'était pas interposé. Habillé de manière très chic, je n'avais pas particulièrement besoin d'un dessin pour comprendre qu'il était plus âgé que celui qui m'avait attrapé & amené à lui. Il dégagea cet autre vampire qui avait tenté de m'attaquer avant de m'aider à me relever du sol où j'étais tombé. À première vue, il ne semblait pas me vouloir de mal, mais je préférais tout de même rester sur mes gardes. Et puis, qui était-il pour que je devienne son docile petit animal de compagnie ?? Où que je sois & quoi que je sois devenue, il était absolument hors de question que je me laisse faire. Je n'étais pas partie de mon enfer personnel pour finir dans un autre.

Pendant mes premières semaines en Russie, je fis mon maximum pour en apprendre le plus possible sur le mode de vie ici. Apparemment, j'étais devenue l'esclave de ce vampire qu'on prénommait Nikolaï. D'après la manière dont d'autres maîtres traitaient leurs esclaves, j'étais censée être sa petite poche de sang personnelle qui devait lui obéir au doigt & à l’œil. Déjà, cette idée ne me plaisait pas le moins du monde. Il était absolument hors de question que je le laisse me vider de mon sang sans rien dire, ni que je fasse ses quatre volontés. J'étais née libre & je comptais le rester jusqu'à mon tout dernier souffle. Peu importe si le prix de cette liberté était la mort. Peu de temps après, je finis par découvrir que celui qui m'avait ramené à Nikolaï était un incube, soit un esclave vampirique du Prince de Russie. Les incube & les succubes sont des créatures exquises à la beauté renversante dont l'unique but est de charmer les êtres humains afin de les amener à leur maîtres afin que ceux-ci en fassent leurs petits jouets personnels ou encore leurs repas. Or, Vasiliy m’avait piégé comme on piège une bête, & croyez moi, j'ai fait d'immense efforts pour ne pas recroiser sa route au cours des premiers mois de ma présence dans ce château. À vrai dire, je faisais même d’immenses efforts pour me faire détester par le moindre vampire de cet endroit. Je me montrais odieuse, voir insolente par moment, les envoyant balader à la moindre occasion. J'étais persuadée qu'à la longue, ils finiraient tous par en avoir assez de moi & mettraient fin à mes jours ce qu'au fond je souhaitais assez. Je n'en pouvais plus de cette vie. Décidément, je ne pourrais jamais vivre de manière normale alors autant mettre un terme à tout ça pendant qu'il était encore temps. Pourtant, aucun mal ne me fût jamais fait. À vrai dire, pour une raison que j'ignore encore aujourd'hui, mon maître ne semblait pas le permettre. Certes, mes agissements ne devaient certainement pas l'enchanter à tout moment, mais jamais il ne me fît le moindre mal. J'avais beau le traiter de monstres, de sangsues, de tous les termes les plus abjectes que je connaissais, jamais il ne semblait se mettre réellement en colère contre moi. De toute évidence, je ne le comprenais pas.

Au bout de quelques mois, il se mit curieusement à me poser des questions sur mon ancienne vie. Comme si ma misérable existence pouvait réellement l'intéresser. C'était surprenant de l'entendre me poser ce genre de question, & c'était d'autant plus surprenant que je réponde à ses interrogations. Pour la première fois de ma vie, je parlais à quelqu'un de mon enfance tourmentée, de la violence de mon père à mon égard, de ma passion grandissante pour la lecture & des moqueries incessantes de mes camarades de classe. À chaque soir, j'arrivais à en parler un peu plus & à chaque soir, il m'écoutait, comme si mon ancienne vie pouvait avoir une réelle importance à ses yeux. Curieusement, je me mis petit à petit à ressentir un certain lien de confiance à son égard. De toute évidence, il n'était pas comme les autres vampires de cette ville, ni comme ceux des romans non plus. Il ne me voulait réellement aucun mal & ne buvait jamais de mon sang d'ailleurs, m'avouant qu'il préférait attendre que j'eu atteint ma majorité pour profiter du liquide rouge qui coulait dans mes veines. J’'avais le droit de passer mes journée entière à la bibliothèque afin de parfaire mon éducation. Je finis même par atteindre le niveau d'un diplôme du lycée tout en apprenant davantage sur le mode de vie des créatures que je fréquentais à présent. Pour la première fois de ma vie, j'avais enfin le curieux sentiment d'être à ma place sur auprès de mon maître. Pour la première fois de ma vie, j'avais le sentiment qu'on s'intéressait réellement à moi. Peu importe si Nikolaï était un vampire vieux de plusieurs siècles & qui avait déjà volés la vie à de nombreux innocents bien avant mon arrivée ici, il m'apportait le réconfort dont j'avais besoin & pour cela, je me devais de lui être fidèle à chaque instant. Tout ce que j'avais à faire pour ne pas attiser sa colère, c'était d'obéir aux quelques règles qu'il m'avait imposées. Je ne devais pas lui tenir tête, ni le faire attendre lorsque il en avait besoin. Deux règles assez simples à respecter. Bien que j'aie encore une profonde forme de répulsion envers les autres vampires, je n'avais aucune envie de contrarier mon maître. Il m'avait sauvé de ma misérable existence & pour cela, je lui devais tout. Et puis, il me laissait par faire mon éducation, ce qui était donnant-donnant. Encore aujourd'hui, je suis persuadée que c'est mon éloquence qui m'a permit d'avoir la vie sauve lors de mon arrivée en Russie. Mais ça je ne compte pas réellement lui poser la question.

Trois ans se sont écoulés depuis le début de ma dévotion à Nikolai. Trois années assez riches en émotions mais qui m'ont néanmoins rendue plus forte. Il y a six mois, nous avons quittés la Russie pour venir nous installer sur une île dont je n’avais pratiquement jamais entendue parlée :: Heartkiller. Elle est située pile au milieu du triangle des Bermudes, ce qui est la preuve que les légendes englobant ce fameux triangle étaient véridiques. J’ai découvert avec le temps que les incubes & succubes ne font pas que parcourir le monde pour ramener des esclaves à leurs maîtres. Certains humains subissent des écrasements d’avions, ou encore des naufrages, & là, c’est le moment idéal pour les vampires de partir la chasse aux repas ou aux esclaves. Je réalise aujourd’hui que j’ai énormément de chance d’être tombée sur un maître aussi bon envers moi. Pendant que les esclaves des autres vampires doivent se plier aux moindres caprices de leurs maîtres s'ils ne veulent pas risquer l'exécution, j’ai le droit de passer mes journées entières à la bibliothèque ou à vaquer à mes propres occupations, en autant que je respecte toujours les règles. Je ne pourrais pas vraiment souhaiter mieux. J'ai aujourd'hui atteint ma majorité, ce qui signifie que je suis dorénavant une source de sang pour mon maître. Je ne peux pas dire que tout ceci soit réellement désagréable. Nikolaï ne m'a en rien obligé à lui fournir mon hémoglobine personnelle. Seulement, je crois que je me dois de le faire. Je suis sa propriété & je me suis faite à l'idée. Et dans un sens, si je peux épargner la vie de pauvres innocents de mon espèce pendant quelques temps & bien soit, je lui offrirai tout le sang dont il aura besoin pendant tout le temps que durera ma vie. Je n'ai pas peur de vieillir. Pas réellement du moins. C'est sûre que de me voir changer au fil des jours pendant que la plupart des autres habitants de l'île restent tels quels est assez surprenant, mais ce n'est pas ce que je crains le plus. Ce qui me fait peur en fait, c'est de finir par avoir la même maladie que ma mère. Le cancer est une maladie d'humains, & je sais que ce n'est pas en vivant sur une île remplie de vampires que je vais tout de même échapper à la maladie. Bref, je tente tout de même de vivre ma vie au maximum. Mon existence actuelle me plaît assez, bien qu’elle diffère assez de la vie que je m'étais prévue. Après tout, l’existence humaine ne devrait-elle pas être ainsi ?? Pleine de surprises ?? C'est du moins l'idée que je m'en fais.