Les balles sifflent, les grenades pleuvent, les corps tombent.. Et moi au milieu de tout cela, je me demande comment ma vie a pu arriver à ce terme. Surement poussé par trop d'orgueil, voulant prouver au monde entier, à mes parents et à mon entourage que j'étais capable de faire quelque chose de ma vie. D'aider mon pays à la place de mon père qui n'avait pas assez de couille pour y aller. Mon jeune âge ne m'a pas empêché de prendre les armes et de partir pour la France, défendant des territoires que je ne connaissais même pas. Pourtant, nous étions des milliers, des milliers d'Australiens à mettre en jeu leur vie pour en sauver d'autre. Stupide comme raisonnement quand j'y pense. La fierté m'avait mené jusqu'ici et maintenant je me retrouvais seul, sans parents, sans fierté.. Avec juste comme complice un fusil dont je savais à peine me servir, je n'étais qu'un pion parmi tant d'autre, à attendre qu'on vienne nous liquider comme des lapins. J'avais la sensation d'être utilisé comme appas, pas assez de courage pour défendre son pays alors on vient chercher les jeunes de loin pour combattre à leur place. Tout ce brouhaha de guerre me rendait sourd, je bougeais à peine. Le monde autour de moi semblait accéléré, je n'avais qu'une envie, partir loin, fuir de champ de bataille en hurlant devant cette folie. A quoi bon continuer quand son corps ne veut plus bouger, quand on sent que tout espoir a quitté votre corps avec votre sang qui l'accompagne. L'essence même de notre vie que vous sentez couler par terre pour en faire profiter le sol. La lèvre tremblante alors que vous n'avez pas froid, du moins pas encore. Le point de vue est autre, lorsqu'on est en dessous, sous les balles qui cillent le ciel sans vraiment savoir leur cible, les cris lointains de ses camarades lorsqu'ils se croient que vous êtes morts. Puis il y a les souvenirs qui vous envahissent, ceux de votre enfance avec les odeurs de la mer et de la cuisine de votre mère, son sourire et son rire. Toutes ses choses futiles et pourtant qui vous réchauffe le cœur une dernière fois. Sans savoir pourquoi ni comment le silence perçant se fait entendre de plus en plus, on ne sait plus si ce sont ses oreilles qui sont défaillantes ou si les troupes se sont retirées. Elles sont parties en même temps que mon désir qu'on me retrouve enfin. J'essaye de garder l'esprit ouvert, une dernière perspective d'avenir s'insinue dans mon esprit. Parce qu'on veut y croire encore, s'accrocher à cette lueur.. Puis le bruit s'infiltre dans tes oreilles, j'espère plus que tout que ce soit quelqu'un venu me sauver, la nuit commence à pousser le soleil pour lui faire de la place, s'installant égoïstement dans le ciel. Quelqu'un vient pour me sauver, je le sais, je le sens.. La douleur est partie, je ne la sente presque plus. C'est comme si rien ne s'était passé, seulement je le sais. La plaie est encore présente, ouverte et attaquant mon corps. Qui pouvait être cette personne, un allié, un ennemi.. ou bien une personne qui passait par là ? Tout ce qu'on pouvait espérer c'était que cette personne me sauve, qu'elle est au moins une once de sensibilité envers un jeune homme fier et orgueilleux, mais qui restait néanmoins à terre. L'obscurité me floutait la vue et je ne vis que la silhouette de l'homme qui s'approchait de moi. D'un dernier élan de force traversa mon corps et ma main s'accrocha à sa cheville.. Je ne connaissais pas cette personne, mais je n'en avais que faire, c'était mon seul espoir, le dernier... L'ultime. « S'il vous plait.. Sauvez-moi. » La voix n'était plus la même, pas reconnaissable du tout, comme changer avec la douleur, le froid, l'oublie.. Enfin j'ai pu voir son visage lorsqu'il se pencha vers moi, ce n'était pas un soldat. Son visage était trop propre, trop nette pour être l'un des nôtres. Son regard glaça encore plus le sang qui avait du mal à couler dans mes veines. « C'est trop tard.. Mais je peux faire un effort pour toi mon beau. » Je n'avais désormais plus la force de froncer les sourcils, même plus la sensation de pouvoir bouger un seul muscle, le fait de rester les yeux ouverts était une véritable épreuve. Ma poitrine se contracte douloureusement lorsque l’inconnu s'approche de moi, trop près.. Beaucoup trop près. Deux secondes passent et la douleur ne se fait plus sentir dans mon estomac.. Mais dans mon cou, une vive douleur se fait sentir, transperçant mon corps avec ses dents et avec effroi.