Chapitre I: Père et frère

Tu étais un adulte dans un corps d’enfant, c’est comme ça qu’elle te voyait tous les jours, elle t’aimait et t’admirait à la fois. Tu ne voyais en elle qu’une gamine innocente et c’est vrai qu’elle l’était, mais elle souffrait tout autant que toi de votre situation difficile. Elle avait souvent faim, mais ne disait rien. Elle se questionnait sur votre père sans oser te faire part de ses interrogations. Elle détestait vous voir pleurer votre mère et toi, alors elle utilisait son innocence pour tenter de vous faire sourire, pour vous donner un minimum de bonheur. Elle ne se plaignait jamais, restant silencieuse, mais en secret elle t’observait. Elle savait bien que toutes ces responsabilités te pesaient, elle s’en voulait parfois aussi d’être un poids pour toi. Tu étais si grand, solide, tout ce qu’elle voulait c’était devenir comme toi pour pouvoir te voir moins soucieux. Tu n’avais que trois an de plus vieux qu’elle, mais à ses yeux, c’est comme si un siècle entier vous séparait, une vie entière. Tu avais l’autorité et le sérieux d’un père, mais le cœur et le côté protecteur du frère. Tu étais tout pour elle, l’homme de sa vie. Quant à votre mère, elle passait si peu de temps en sa compagnie qu’elle n’était qu’une inconnue, une âme vivant dans l’appartement, mais qui lui était totalement étrangère. Il n’y avait toi qui arrivais à l’endormir et à la calmer lorsqu’elle faisait des cauchemars ou avait peur. Tu l’as tellement enrobée d’amour et de protection qu’elle a su garder son cœur d’enfant contrairement à toi, son seul désir était de voir les coins de ta bouche se relever pour que sur tes lèvres puisse fleurir un sourire. Elle ignorait tout des cruautés du monde grâce à toi, elle avait des rêves et des espoirs. Il ne pouvait y avoir un amour plus fort que celui qu’elle éprouvait pour toi.

Chapitre II : La découverte du mal

Tout son univers de bonheur et d’innocence s’est fissuré ce jour-là. Tu l’avais tellement protégée qu’elle n’avait pas appris à avoir peur, elle ne craignait rien ni personne, car elle se disait que tu serais toujours à ses côtés pour empêcher que qui ou quoi que ce soit lui fasse du mal. C’est cette naïveté qui lui a attiré des ennuis, ceux qui t’ont ensuite créer des soucis à ton tour. Elle se trouvait dans le parc tout près de l’école et se balançait. Ses yeux étaient dirigés vers le ciel, se questionnant sur le cadeau d’anniversaire qu’elle allait pouvoir t’offrir, c’était encore dans des semaines, mais elle préférait y songer en avance. Soudain elle réalisa qu’il commençait à se faire tard, elle devait rentrer maintenant. Elle sauta en bas de son siège et hissa son sac d’école sur ses épaules. Le parc qu’elle avait choisi ne se trouvait pas dans un quartier très fortuné, ni très sécuritaire, mais jamais elle n’avait eu à se soucier de ce détail. Alors qu’elle allait partir elle aperçut l’un de tes amis, Fyodor. Jamais elle ne se serait doutée que son grand frère, son héros, avait de mauvaises fréquentations. De son point de vue tous tes amis étaient les siens et lui voulaient du bien. Elle le salua alors avec un grand sourire. Il est vrai que souvent elle sentait son regard fixé sur elle lorsqu’il venait à la maison et qu’il arrivait qu’elle en soit mal à l’aise, toutefois elle ignorait la signification d’un tel regard. C’est ce soir-là qu’elle l’apprit à ses dépens. Il s’approcha d’elle d’un pas, puis de deux, ensuite de trois… Il continua d’avancer et à un moment elle eut l’impression que c’était trop. Elle voulut reculer, mais il était trop tard. L’adolescent l’agrippa fermement et se mit à glisser ses mains sous son chandail, commençant par son ventre jusqu’à ce que ces petites baladeuses montèrent plus haut. Les larmes lui montèrent aux yeux et elle prit peur, tu lui avais répété plusieurs fois que son corps lui appartenait, qu’elle ne devait laisser personne la toucher de cette façon. Ces « caresses » ne lui plaisaient guère, elle commençait à avoir peur. Elle tentait toujours de se libérer, mais à chaque fois il la tenait plus fermement. Heureusement ta petite chérie avait toujours été très chanceuse, quelqu’un passa par là et réussit à maitriser l’homme. Ne voulant pas rester là un instant de plus elle courut de ses jambes frêles jusqu’à la maison, jusqu’à toi, jusqu’à tes bras, le seul endroit où elle était protégée de tout. Une fois qu’elle eut atteint ce but elle pleura, elle n’avait aucun mal non, cependant le fait de savoir que certains pouvaient lui vouloir du mal l’avait terrifiée. Depuis ce jour elle devint apeurée dès qu’une personne de sexe masculin s’approchait trop d’elle, sauf toi bien entendu. Elle croyait que cette petite expérience allait être la pire épreuve de son existence, elle n’aurait pas pu croire à un plus gros mensonge.

Chapitre III : La chute

Jamais elle ne t’avait vu réellement en colère, elle ignorait à quel point ce petit incident allait t’affecter et faire basculer sa vie. Elle ne le réalisa que lorsque les policiers arrivèrent à la maison pour annoncer à sa mère et elle que tu avais battu le coupable, que tu avais l’intention de le frapper jusqu’à la mort et que tu ne l’as aucunement nié. Tu allais donc être envoyé en prison pour tentative de meurtre. A cet instant. Sa candeur seulement ébranlée lors des attouchements de ton « amis », vola en éclat, car maintenant elle devait s’occuper d’elle-même. Votre mère travaillait toujours autant, elle en devenait de plus en plus malade. Celle que tu adorais se retrouva seule au monde, tu étais l’unique personne qui composait son univers et tu étais maintenant parti au loin. Elle ne pouvait aller te rendre visite en prison, car votre mère refusait de l’y emmener. Elle pleura pratiquement toutes les nuits qui ont suivies ton départ, c’était pire qu’une peine d’amour, elle avait perdu un père et un frère dans la même journée. Tes amis venaient lui rendre visite de temps à autre, jusqu’à la prendre sous leur aile. Elle ne se rendait pas compte dans quoi elle se mettait les pieds, tout ce qu’elle savait était que son frère lui manquait plus que tout au monde. Ta mère n’étant jamais présente, elle passa de plus en plus de temps en compagnie de ceux que tu fréquentais autrefois. Ayant maintenant treize ans, la petite chenille commençait à sortir de son cocon, son appartenance au sexe féminin se faisait de plus en plus évidente, ce qui attirait de plus en plus tes « copains ». Au bout d’un an, l’un d’eux lui fit découvrir l’univers de l’eau de vie. Innocente comme elle l’avait toujours été, elle refusa net la drogue, substance contre laquelle tu l’avais mise en garde, mais elle n’a aucunement refusé le verre de vodka qu’on lui tendit. Une fois alors qu’elle avait la tête complètement dans les nuages, elle se mit à donner du plaisir à ceux qui lui tenaient compagnie sans toutefois leur donner sa virginité. Avec ces petits jeux elle put gagner un peu d’argent pour payer ses consommations et un peu de nourriture, sa mère se chargeant des factures et autres papiers de ce genre.  Ils arrivaient à se servir d’elle, alors que tout ce qu’elle souhaitait était de moins souffrir de ton départ, c’est ce que ce liquide magique lui apportait, la tranquillité d’esprit.

Chapitre IV : Renaissance

Ce n’est qu’à ton retour miraculeux qu’elle perdit cette dépendance malsaine. Lui servant de guide comme tu l’as toujours fait, tu as su lui faire comprendre à quel point son habitude de trop boire était néfaste pour elle. Elle s’en voulut d’avoir fait tant d’erreurs, elle se sentait coupable de te faire honte de cette façon, toi qui était un véritable super-héros à ses yeux, ignorant que toi-même tu n’avais pas un passé des plus reluisants. Voulant se racheter à tes yeux et pour te faire retrouver le sourire, elle eut la brillante idée de t’emmener en voyage. Quoi de mieux que de voir de nouveaux horizons pour repartir à neuf? Vous veniez de perdre tout récemment votre mère et deviez tous les deux commencer une vie modèle, alors valait mieux partir du bon pied. Encore une fois elle t’a attiré dans ses ennuis par son innocence attachante, elle vous a tous les deux condamnés … Une fois sur cette ile elle ne savait pas quoi faire, elle était totalement perdue, elle ne te quittait plus d’une semelle, elle était redevenue une simple petite fille apeurée. Un inconnu avec les yeux qui louchaient un peu trop sur elle vous aida, vous croyiez tous les trois que vous alliez pouvoir quitter cette île sans vous faire remarquer. Malheureusement avec ta malchance que t’attirait ta cadette depuis toujours, c’est bien sur toi qui disparus. Probablement emprisonné par les vampires devina-t-elle. Encore une fois elle se retrouva seule, sans ta main pour qu’elle puisse se relever.

*****

Voilà ce que l’innocente petite fille que j’étais t’a fait subir, peut-être que notre mauvaise condition de départ n’était pas de ma faute, mais aucun de nous ne peut nier que c’est de ma faute si tu as été arrêté, mais surtout que c’est mon idée de voyage qui nous a fait échouer sur cette île maudite. Je m’en suis toujours sortie grâce à ma chance, mais chaque fois que je réussissais à remonter à la surface, je ne faisais que te caler davantage dans l’eau profonde du malheur. Je le réalise aujourd’hui et je me maudis d’avoir été si innocente et de l’être encore à ce jour. Tu n’es pas là pour être ma force ou mon courage, cette fois-ci, c’est moi qui doit te sortir du pétrin, c’est moi qui dois devenir ta super-héroïne…

Ta sœur qui t'adore à en mourir,
Helenka